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— Oui, parce que c’est encore plus important, déc<strong>la</strong>ra nettement Judith.<br />
— Vous me coupez le souffle, murmura Norton.<br />
— Ainsi donc, reprit Boyd Carrington en s’adressant à ma fille, vous prendriez ce risque,<br />
vous.<br />
— Je le crois. Le risque ne m’effraie pas.<br />
— Moi, je ne le ferais pas. On ne peut pas permettre aux gens de décider de <strong>la</strong> vie ou de<br />
<strong>la</strong> mort.<br />
— En réalité, dit Norton, <strong>la</strong> plupart des gens n’auraient pas le courage d’assumer une telle<br />
responsabilité.<br />
Il esquissa un sourire et regarda Judith.<br />
— Et je ne crois pas que vous l’auriez, ce courage, si le cas se présentait.<br />
— On ne peut évidemment être sûr de rien, reconnut ma fille d’un ton calme. Mais je<br />
pense que je l’aurais.<br />
— J’en doute. À moins que vous n’y ayez un intérêt personnel.<br />
Judith rougit violemment et l’apostropha d’un ton vif.<br />
— Votre remarque prouve que vous ne comprenez rien du tout. Si j’avais un… motif<br />
personnel, je ne pourrais rien faire !<br />
Puis, s’adressant à tous :<br />
— Il est indispensable que l’acte soit absolument impersonnel et désintéressé.<br />
— Tout de même, insista Norton, vous ne le feriez pas.<br />
— Si. D’abord, je considère pas que <strong>la</strong> vie soit une chose aussi sacrée qu’on le prétend<br />
généralement. Les vies inutiles devraient être supprimées. Seuls les gens qui apportent à <strong>la</strong><br />
communauté une contribution va<strong>la</strong>ble devraient être autorisés à vivre.<br />
Elle tourna vivement <strong>la</strong> tête vers Boyd Carrington.<br />
— Vous êtes de mon avis, n’est-ce pas ?<br />
— En principe, oui, répondit-il d’une voix lente. Seuls devraient survivre ceux qui le<br />
méritent.<br />
— Bien des gens accepteraient sans doute votre théorie, intervint à nouveau Norton ;<br />
quant à <strong>la</strong> mettre en pratique…<br />
— Ce n’est pas logique ! répliqua Judith.<br />
— Bien sûr que non, puisque c’est simplement une question de courage. Si vous me<br />
permettez cette expression triviale, je dirai que <strong>la</strong> plupart des gens n’ont pas « assez<br />
d’estomac » pour se <strong>la</strong>ncer dans une semb<strong>la</strong>ble aventure.<br />
Judith se taisant, il poursuivit :<br />
— Franchement, je suis persuadé que vous agiriez de même. Le moment venu, le courage<br />
vous manquerait.<br />
— Vous croyez ?<br />
— J’en suis sûr.<br />
— Moi, dit Boyd Carrington, je crois que vous vous trompez, Norton. Judith a beaucoup de<br />
courage. Fort heureusement, le cas dont nous discutons ne se présente que rarement.<br />
À l’intérieur de <strong>la</strong> maison, le gong retentit soudain. Judith se leva et adressa encore<br />
quelques mots à Norton.<br />
— Vous savez, vous êtes dans l’erreur <strong>la</strong> plus complète. J’ai beaucoup plus de cran que<br />
vous ne l’imaginez.<br />
Elle tourna les talons et se dirigea vers <strong>la</strong> maison d’un pas rapide. Boyd Carrington courut