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Mrs. Franklin soupira à nouveau.<br />
— Je sais bien que je devrais m’intéresser davantage aux travaux de mon mari, mais ça<br />
m’est impossible. Je me sens si peu à <strong>la</strong> hauteur. Je crois qu’il y a véritablement en moi<br />
quelque chose qui ne va pas. Pourtant…<br />
Elle fut interrompue par un petit ricanement de Boyd Carrington, debout près de <strong>la</strong><br />
cheminée.<br />
— Sottises, Babs. Tu es parfaite. Ne te tracasse donc pas.<br />
— Mais Bill, mon ami, je me tracasse. Je me décourage si facilement… Je ne peux<br />
m’empêcher de ressentir… C’est si désagréable, ces cobayes, ces rats et je ne sais plus quoi<br />
encore. Brr !<br />
Elle frissonna.<br />
— Je sais que c’est stupide, mais ça me rend ma<strong>la</strong>de. Je voudrais ne penser qu’à de belles<br />
choses : aux oiseaux, aux fleurs, aux jeux des enfants. Toi, tu le sais, n’est-ce pas, Bill ?<br />
Boyd Carrington s’avança et prit <strong>la</strong> main qu’elle lui tendait d’un air implorant, il baissa les<br />
yeux vers elle, et son visage aux traits si virils prit soudain une douceur extraordinaire.<br />
— Tu sais, Babs, tu n’as pas beaucoup changé depuis tes dix-sept ans.<br />
Il tourna un instant <strong>la</strong> tête vers moi.<br />
— Barbara et moi sommes de vieux camarades de jeunesse.<br />
— Oh ! de vieux camarades ! protesta <strong>la</strong> jeune femme.<br />
— Je veux bien reconnaître que j’ai quinze ans de plus que toi. Mais quand tu étais bébé,<br />
j’ai joué avec toi comme avec une poupée, je t’ai portée sur mon dos. Et plus tard, quand je<br />
suis revenu, tu étais une belle jeune fille prête à faire son entrée dans le monde. J’y ai même<br />
un peu contribué en t’apprenant à jouer au golf. Tu te rappelles ?<br />
— Oh ! Bill, crois-tu que j’aie pu oublier tout ce<strong>la</strong> ?<br />
Elle tourna vers moi son ravissant visage de madone…<br />
— Mes parents habitaient l’Angleterre, expliqua-t-elle, et Bill venait parfois faire des<br />
séjours chez son vieil oncle Sir Everard, à Knatton.<br />
— Quel mausolée c’était – et c’est encore ! Parfois, je désespère de rendre habitable<br />
cette vieille bâtisse.<br />
— Oh ! Bill, ce serait pourtant merveilleux si tu pouvais y arriver !<br />
— C’est vrai, Babs. L’ennui, c’est que je n’ai aucune idée. Des baignoires, quelques<br />
fauteuils vraiment confortables… Je me sens incapable de penser à autre chose. Il faudrait<br />
une femme pour arranger tout ça.<br />
— Je t’ai déjà dit que je viendrais, si tu le vou<strong>la</strong>is. Je parle sérieusement, Bill.<br />
— Si tu te sens assez forte, je pourrais t’y amener.<br />
Il leva des yeux interrogateurs vers l’infirmière.<br />
— Qu’en pensez-vous, Miss Craven ?<br />
— Certainement, Sir William. Je suis d’avis que cette promenade ferait le plus grand bien<br />
à Mrs. Franklin. À condition, naturellement, qu’elle soit assez raisonnable pour ne pas se<br />
surmener.<br />
— C’est donc entendu, reprit Boyd Carrington. Et maintenant, ma petite Babs, tu vas<br />
tâcher de bien dormir, afin d’être en forme demain.<br />
Nous prîmes tous les deux congé de <strong>la</strong> jeune femme et sortîmes ensemble. Comme nous<br />
de<strong>sce</strong>ndions l’escalier, mon compagnon prit <strong>la</strong> parole d’un ton brusque.<br />
— Vous n’avez pas idée, Hastings, de <strong>la</strong> ravissante créature qu’était Barbara à l’âge de