Mares temporaires
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Les mares <strong>temporaires</strong> méditerranéennes<br />
vivants”. Leurs œufs très résistants (voir Encadré 32, Chapitre 3b)<br />
sont de bons traceurs dans le suivi des aires de distribution. Les<br />
espèces du genre Linderiella illustrent, par exemple, la dérive des<br />
continents. Entre continents européen, américain et africain, on<br />
dénombre 5 espèces endémiques vicariantes* des mares <strong>temporaires</strong><br />
sous climat méditerranéen (L. africana, L. sp. en Espagne, L. santarosae<br />
et L. occidentalis en Californie, et L. massaliensis en Provence)<br />
qui dérivent toutes, par spéciation allopatrique*, d’une espèce<br />
souche. Des cas d’endémisme sont possibles comme pour le genre<br />
Tanymastigites cantonné à l’Afrique du Nord (5 espèces répertoriées).<br />
Les Balkans et les zones montagneuses, du fait de leur isolement<br />
durant le Quaternaire, constituent également des foyers d’endémisme 65<br />
pour plusieurs genres (Branchinecta, Branchipus, Tanymastix, Chirocephalus<br />
du groupe spinicaudatus).<br />
Ces espèces, qui ont traversé sans réels dommages les diverses crises<br />
climatiques, sont actuellement à la merci des actions anthropiques.<br />
Les principales menaces sont les introductions de poissons (par<br />
exemple, introductions fréquentes de perches soleil, Lepomis gibbosus,<br />
de gambusies, Gambusia affinis, etc.), la destruction des sites<br />
(comblements, creusement), et les modifications de la composition<br />
chimique des eaux qui peuvent inhiber les éclosions lors des remises<br />
en eau. Dans tous les cas, les populations séparées les unes des<br />
autres par fragmentation de leurs aires de distribution sont fragilisées<br />
par la réduction des échanges entre elles (connectivité*).<br />
D’un point de vue scientifique, les Branchiopodes représentent des<br />
sujets de choix pour l’étude des métapopulations*, la compréhension<br />
de leur stabilité génétique au sein des populations, les phénomènes<br />
de diapause des œufs de résistance, les adaptations<br />
écophysiologiques en réponse à l’anoxie*, la thermo-tolérance (sécrétion<br />
de protéines protectrices : les HSPs), etc.<br />
A ces divers titres, les Branchiopodes sont de véritables symboles<br />
des mares <strong>temporaires</strong>. Ils doivent faire l’objet de mesures conservatoires<br />
et d’une définition de statuts de protection comme c’est<br />
le cas en Californie 133 ou à Malte 224 .<br />
34<br />
Triops cancriformis, un crustacé emblématique des mares <strong>temporaires</strong><br />
Roché J.<br />
e. Insectes<br />
Thiéry A.<br />
La faune entomologique des mares <strong>temporaires</strong> du Bassin méditerranéen<br />
est actuellement connue dans ses grandes lignes. Parmi<br />
les groupes a majeurs colonisant régulièrement ces habitats, on<br />
trouve :<br />
• les Ephémères avec 2 genres Cloeon et Caenis,<br />
• de nombreux Odonatoptères (libellules), avec des Zygoptères<br />
(Lestes, Ischnura, Coenagrion) et des Anisoptères (Sympetrum,<br />
Aeschna, Anax, Crocothemis, etc.),<br />
• de nombreux Hétéroptères (punaises d’eau) : Notonecta, Plea,<br />
Sigara, Corixa, Micronecta et Gerris,<br />
• les Coléoptères : Dytiscidae (Dytiscus, Agabus, Noterus, Coelambus),<br />
Gyrinidae (Gyrinus), Helophoridae (Helophorus, Berosus,<br />
Hydrous, Anacaena), Haliplidae (Haliplus), etc.,<br />
• quelques Trichoptères (Limnephilus, etc.),<br />
• les Diptères principalement représentés par les Chironomides, les<br />
Ceratopogonidae et les Culicidae.<br />
Si les Ephémères, les Odonates, les Trichoptères et les Diptères ne<br />
se présentent, dans l’eau, que sous forme larvaire, en revanche, les<br />
Hétéroptères et les Coléoptères utilisent également le milieu à<br />
l’état adulte (imagos). Dans tous les cas, les cycles biologiques des<br />
insectes comprennent une phase aérienne et une phase aquatique<br />
contrairement à ceux des crustacés des milieux aquatiques permanents<br />
(Cladocères, Copépodes, etc.), dont tous les stades de vie<br />
se déroulent en milieu aquatique.<br />
D’un point de vue biogéographique, la plus grande partie des<br />
insectes peuplant les milieux <strong>temporaires</strong> de la région méditerranéenne<br />
sont d’origine paléarctique, y compris ceux d’Afrique du Nord.<br />
Les endémiques sont très rares, et la plupart des espèces ont des<br />
aires de distribution assez étendues.<br />
La composition des communautés d’insectes des mares <strong>temporaires</strong><br />
est très variable et en grande partie déterminée par l’hydrologie<br />
de l’habitat. La richesse en insectes croît avec la durée de<br />
submersion (Tab. 11) :<br />
• Si le milieu est éphémère, on ne trouvera que quelques Diptères<br />
ubiquistes*, à cycles courts, comme les Chironomides et certains<br />
Culicides (moustiques). Ces espèces n’interfèrent que très peu avec<br />
la faune des crustacés, inféodée à ce milieu (Chapitre 2d) : le système<br />
fonctionne avec des entités cloisonnées, sans interactions<br />
trophiques*.<br />
• Lorsque la durée de submersion est plus longue, on assiste à la<br />
colonisation par quelques insectes (Ephémères : Cloeon, Coléoptères<br />
Hydrophilidae : Berosus, Helophorus, Coléoptères Dytiscidae :<br />
Coelambus, Agabus), la plupart du temps herbivores ou détritivores.<br />
Les pontes de ces insectes peuvent se développer et la communauté<br />
d’invertébrés se complexifie.<br />
• Quand la mare reste en eau quelques mois, un deuxième cortège<br />
d’insectes colonisateurs, très souvent des prédateurs, arrive :<br />
les Odonates, les Hétéroptères (Notonecta, Plea, Corixa, Sigara), les<br />
Coléoptères (Gyrinus, Gerris, Dytiscus). Dans ces mares à inondation<br />
longue, la richesse spécifique augmente et les chaînes trophiques<br />
se diversifient.<br />
a. Pour l’identification taxonomique des insectes, voir Tachet et al. 368 dont le domaine<br />
d’application couvre tout le Bassin méditerranéen. Pour les Odonates, voir D’Aguilar<br />
& Dommanget 101 et pour les Coléoptères, Franciscolo 150 et Pirisinu 301.