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SANS FAMILLE

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coups n’y faisaient rien, employa un autre moyen. « Pour chaquesou qui te manquera, je te retiendrai une pomme de terre àton souper, me dit-il. Puisque ta peau est dure aux coups, tonestomac sera peut-être tendre à la faim. » Est-ce que les menacesvous ont jamais fait faire quelque chose, vous ?– Dame, c’est selon.– Moi, jamais ; d’ailleurs je ne pouvais faire plus que ce quej’avais fait jusque-là ; et je ne pouvais pas dire à ceux à qui jetendais la main : « Si vous ne me donnez pas un sou, je n’auraipas de pommes de terre ce soir ». Les gens qui donnent aux enfantsne se décident pas par ces raisons-là.– Et par quelles raisons se décident-ils ? on donne pourfaire plaisir.– Ah bien ! vous êtes encore jeune, vous ; on donne pour sefaire plaisir à soi-même et non aux autres ; on donne à un enfantparce qu’il est gentil, et ça c’est la meilleure des raisons ; onlui donne pour l’enfant qu’on a perdu ou bien pour l’enfantqu’on désire ; on lui donne parce qu’on a bien chaud, tandis quelui tremble de froid sous une porte cochère. Oh ! je connais toutesces manières-là ; j’ai eu le temps de les étudier ; tenez, il faitfroid aujourd’hui, n’est-ce pas ?– Très-froid.– Eh bien ! allez vous mettre sous une porte et tendez lamain à un monsieur que vous verrez venir rapidement tassédans un petit paletot, vous me direz ce qu’il vous donnera ; tendez-la,au contraire, à un monsieur qui marchera doucement,enveloppé dans un gros pardessus ou dans des fourrures, etvous aurez peut-être une pièce blanche. Après un mois ou sixsemaines de ce régime-là, je n’avais pas engraissé ; j’étais devenupâle, si pâle, que souvent j’entendais dire autour de moi :– 278 –

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