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SANS FAMILLE

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Ce jardin, qui n’était pas grand, avait pour nous une valeurconsidérable, car c’était lui qui nous nourrissait, nous fournissant,à l’exception du blé, à peu près tout ce que nous mangions: pommes de terre, fèves, choux, carottes, navets. Aussin’y trouvait-on pas de terrain perdu. Cependant mère Barberinm’en avait donné un petit coin dans lequel j’avais réuni une infinitéde plantes, d’herbes, de mousse arrachées le matin à lalisière des bois ou le long des haies pendant que je gardais notrevache, et replantées l’après-midi dans mon jardin, pêle-mêle, auhasard, les unes à côté des autres.Assurément ce n’était point un beau jardin avec des alléesbien sablées et des plates-bandes divisées au cordeau, pleines defleurs rares ; ceux qui passaient dans le chemin ne s’arrêtaientpoint pour le regarder par-dessus la haie d’épine tondue au ciseau,mais tel qu’il était, il avait ce mérite et ce charme de m’appartenir; il était ma chose, mon bien, mon ouvrage ; je l’arrangeaiscomme je voulais, selon ma fantaisie de l’heure présente,et quand j’en parlais, ce qui m’arrivait vingt fois par jour, je disais« mon jardin ».C’était pendant l’été précédent que j’avais récolté et plantéma collection, c’était donc au printemps qu’elle devait sortir deterre, les espèces précoces sans même attendre la fin de l’hiver,les autres successivement.De là ma curiosité, en ce moment vivement excitée.Déjà les jonquilles montraient leurs boutons, dont la pointejaunissait, les lilas de terre poussaient leurs petites hampespointillées de violet, et du centre des feuilles ridées des primevèressortaient des bourgeons qui semblaient prêts à s’épanouir.Comment tout cela fleurirait-il ?– 52 –

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