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Subjectivations politiques et économie des savoirs - Service de ...

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– Revue <strong>de</strong> philosophie politique <strong>de</strong> l’ULg – N°5 – Mai 2013 – p. 110<br />

conformément à l’i<strong>de</strong>ntité qui leur est imposée, ou qu’ils se créent. L’imaginaire<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> i<strong>de</strong>ntités, <strong><strong>de</strong>s</strong> appartenances <strong>et</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> ruptures, est donc la condition <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

conditions, il est comme l’autre scène sur laquelle se machinent les eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong><br />

l’autonomie <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’hétéronomie <strong>de</strong> la politique. À quoi correspond aussi une<br />

politique, irréductible à l’émancipation autant qu’à la transformation, <strong>et</strong> dont je<br />

caractériserai l’horizon éthique comme civilité 12 .<br />

Que c<strong>et</strong>te troisième dimension ait un rapport si étroit avec la question <strong><strong>de</strong>s</strong> i<strong>de</strong>ntités<br />

signale déjà qu’à son tour ce troisième concept <strong>de</strong> la politique ne puisse être<br />

réellement isolé <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong>ux premiers. Les mo<strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong> subjectivation, les constructions<br />

i<strong>de</strong>ntitaires dans lesquelles les individus, pour le dire en termes althussériens, sont<br />

« interpellés en suj<strong>et</strong> », font évi<strong>de</strong>mment partie <strong><strong>de</strong>s</strong> conditions hétéronomes dans<br />

lesquelles se détermine la politique <strong>de</strong> transformation, faisant corps avec les rapports<br />

sociaux, économiques <strong>et</strong> idéologiques qui constituent la « matière » <strong>de</strong> la pratique<br />

politique. D’où la thèse cardinale <strong>de</strong> Marx suivant laquelle le suj<strong>et</strong> <strong>de</strong> la politique se<br />

construit à travers ses luttes, donc à travers <strong><strong>de</strong>s</strong> procès contradictoires <strong>de</strong><br />

subjectivation <strong>et</strong> <strong>de</strong> désubjectivation. Si cependant la politique <strong>de</strong> civilité se distingue<br />

comme un plan spécifique, si donc se pose le problème <strong>de</strong> son articulation aux <strong>de</strong>ux<br />

autres, c’est en fonction <strong>de</strong> l’idée que les dialectisations <strong>de</strong> l’émancipation <strong>et</strong> <strong>de</strong> la<br />

transformation, les mo<strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong> subjectivation qui y opèrent, enveloppent inévitablement<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> lignes d’ascension aux extrêmes où les circuits <strong><strong>de</strong>s</strong> i<strong>de</strong>ntifications <strong>et</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

dési<strong>de</strong>ntifications collectives cessent d’être « maniables », ten<strong>de</strong>nt plutôt à <strong>de</strong>venir<br />

intraitables, en tout cas à excé<strong>de</strong>r toute rationalité politique ou stratégique, tout calcul<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> moyens <strong>et</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> fins, comme si faisait intrusion dans le champ <strong><strong>de</strong>s</strong> pratiques<br />

<strong>politiques</strong> une « autre scène » imposant <strong>de</strong> faire place à du non-politisable. S’y<br />

indiquerait, à la limite, quelque chose <strong>de</strong> l’ordre d’une causalité en rupture par rapport<br />

aux dialectiques <strong>de</strong> l’hétéronomie <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’autonomie, en rupture par rapport aux<br />

dialectiques <strong>de</strong> l’institutionnalisation <strong>et</strong> <strong>de</strong> la désinstitutionnalisation <strong><strong>de</strong>s</strong> rapports <strong>de</strong><br />

forces, sinon en rupture par rapport à toute représentation d’une causalité historique<br />

(c’est en un sens proche ce que Guattari cherchait à penser dans les années 1960,<br />

dans l’idée <strong>de</strong> « coupures désirantes » opérant dans un ordre <strong>de</strong> contre-détermination<br />

par rapport aux chaînes signifiantes <strong>et</strong> causales <strong>de</strong> la temporalité historique).<br />

[Le problème n’est autre ici que celui <strong>de</strong>] la ferm<strong>et</strong>ure <strong>de</strong> la politique qui résulte<br />

du passage continu d’une forme <strong>de</strong> violence dans une autre : ainsi lorsque la<br />

cruauté se manifeste à la suite comme paupérisation, misère physiologique <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

populations, levée <strong><strong>de</strong>s</strong> refoulements culturels <strong>et</strong> religieux qui s’opposent à<br />

l’idéalisation <strong>de</strong> la haine <strong>de</strong> l’autre (c’est-à-dire, le plus souvent, du voisin) en la<br />

cantonnant dans l’inconscient, <strong>et</strong> pour finir, extermination. Ou lorsque<br />

12<br />

Ibid., p. 19.

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