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Subjectivations politiques et économie des savoirs - Service de ...

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– Yves Citton, Laurent Demoulin, Antoine Janvier <strong>et</strong> François Provenzano : « Exploitation,<br />

interprétation, scénarisation. Entr<strong>et</strong>ien avec Yves Citton » – p. 213<br />

l’organisation capitaliste <strong>de</strong> ce mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> production. L’originalité d’Y. Citton tient à l’ajout<br />

d’une dimension à c<strong>et</strong>te lecture <strong>de</strong> l’économie <strong>de</strong> la connaissance comme un capitalisme<br />

cognitif, la dimension <strong>de</strong> l’interprétation. Je ne décrirai pas ici les différentes modalités<br />

constitutives <strong>de</strong> l’interprétation, analysées en profon<strong>de</strong>ur dans les premiers chapitres du<br />

livre, à l’ai<strong>de</strong>, pour l’essentiel, <strong>de</strong> l’interprétation <strong>de</strong>leuzienne <strong>de</strong> Bergson livrée dans les<br />

cours <strong><strong>de</strong>s</strong> années 1980, préparatoire aux volumes que Deleuze consacrera au cinéma. Il<br />

s’agit pour l’essentiel <strong>de</strong> décrire la logique inventive propre à la production <strong>de</strong> connaissances<br />

comme une logique d’interprétation, ce qui perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en évi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong>ux éléments :<br />

premièrement, que la production <strong>de</strong> connaissances est précaire <strong>et</strong> incertaine, autrement dit<br />

qu’elle ne repose pas elle-même sur un savoir ou une connaissance <strong>de</strong> ce qu’il faut<br />

connaître, c’est-à-dire chercher, trouver <strong>et</strong> produire comme <strong>savoirs</strong> (elle a pour critère le<br />

sentiment, sentiment du nouveau <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’importance <strong>de</strong> ce nouveau) ; <strong>de</strong>uxièmement, qu’elle<br />

repose sur une multiplicité, qu’elle se fait toujours « entre » (« inter »), entre <strong><strong>de</strong>s</strong> auteurs,<br />

entre <strong><strong>de</strong>s</strong> textes, entre <strong><strong>de</strong>s</strong> affects, entre <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>savoirs</strong>. Mais l’essentiel, selon moi, <strong>de</strong><br />

l’interprétation du capitalisme cognitif en termes d’interprétation tient à ce qu’elle perm<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />

déterminer les conditions <strong>de</strong> la logique inventive <strong>de</strong> la production <strong>de</strong> connaissances, ce qui<br />

veut dire aussi : ses limites. Peut-être est-ce là la véritable originalité <strong>de</strong> ce livre, par<br />

distinction d’avec le cadre théorique ou le paradigme dans lequel il se situe – pour aller vite :<br />

un paradigme negriste. La production <strong>de</strong> connaissances n’est pas l’être infini <strong>de</strong> la vie<br />

(quelque part, Y. Citton précise qu’il ne propose pas d’ontologie) dont il faudrait accroître la<br />

puissance illimitée. La production <strong>de</strong> connaissances est soumise à <strong><strong>de</strong>s</strong> conditions,<br />

conditions qui sont en contradiction avec la logique capitaliste d’accélération <strong>de</strong> la production<br />

<strong>et</strong> <strong>de</strong> maximisation du profit par privatisation. Ainsi le livre propose d’i<strong>de</strong>ntifier, avec ces<br />

conditions <strong>de</strong> l’interprétation, les leviers d’une résistance face au – voire d’un renversement<br />

du – capitalisme, qui n’existe qu’à détruire ce qui lui perm<strong>et</strong> d’exister. L’illimitation <strong>de</strong> la<br />

production passera par l’institution <strong>de</strong> limites ou <strong>de</strong> conditions dans lesquelles seules elle<br />

peut avoir lieu.<br />

Mais – car il y a un mais –, c<strong>et</strong>te démonstration ne va pas sans poser quelques<br />

problèmes. Je poserai le premier en reprenant l’hypothèse générale sur laquelle le livre<br />

s’appuie, à savoir l’hypothèse d’un passage du capitalisme industriel au capitalisme cognitif.<br />

C<strong>et</strong>te question, il faudrait sans doute la poser à plusieurs auteurs (Antonio Negri en premier<br />

lieu, mais aussi Yann Moulier-Boutang ou Maurizio Lazzarato). Elle se pose néanmoins peutêtre<br />

avec plus d’acuité à la lecture <strong>de</strong> ce livre, en vertu <strong>de</strong> ses qualités mêmes.<br />

Quel est le fait majeur qui justifie l’hypothèse d’une transformation du mo<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

production capitaliste ? Sans doute l’apparition <strong>de</strong> technologies d’information <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />

communication qui ont considérablement accru la circulation <strong>et</strong> la distribution <strong><strong>de</strong>s</strong> données<br />

cognitives. Mais plus encore l’accroissement du secteur tertiaire <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’économie <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

services, sous le développement du Welfare state, principalement <strong><strong>de</strong>s</strong> institutions<br />

éducatives. La conséquence, c’est que les hommes sont désormais dotés <strong>de</strong> capacités

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