Conformément au souhait des réfugiés, le HCR est déterminé à m<strong>et</strong>tre en œuvre un rapatriementle plus vite possible. Si jusque-là <strong>MSF</strong> ne s’est prononcé sur le destin souhaitable des réfugiés quesous <strong>la</strong> forme de prescriptions en faveur du r<strong>et</strong>our au Rwanda, à présent c’est dans le concr<strong>et</strong> deschoix à faire que c<strong>et</strong>te problématique va se poser. <strong>MSF</strong> construit <strong>une</strong> position critique autour de<strong>la</strong> certitude de l’incapacité d’un grand nombre de réfugiés à survivre à un rapatriement : à nouveau,c’est <strong>la</strong> légitimité née de l’action de secours, de l’évaluation médicale de l’état des personnes, quifonde <strong>la</strong> contestation des modalités du rapatriement tel qu’envisagé par le HCR.Ainsi, le 12 avril, <strong>la</strong> porte-parole <strong>MSF</strong> à Kisangani écrit : «l’ensemble de l’opération de rapatriementsera probablement un beau désastre, un semb<strong>la</strong>nt de ‘solution’ au problème des réfugiés (<strong>la</strong><strong>protection</strong> des réfugiés est bien le dernier des soucis du HCR <strong>et</strong> <strong>la</strong> dimension secours va sans douteen pâtir tant que le rapatriement se déroule) ». D’autres documents, internes ou de lobbying, précisentces inquiétudes <strong>et</strong> demandent que le rapatriement soit volontaire, intervienne seulementaprès évaluation médicale de l’état de santé <strong>et</strong> stabilisation. Après <strong>la</strong> multiplication des incidentsde sécurité entre réfugiés <strong>et</strong> popu<strong>la</strong>tion locale, <strong>MSF</strong> recommande «d’accélérer le rapatriementdes familles valides <strong>et</strong> d’assurer <strong>la</strong> <strong>protection</strong> perm<strong>et</strong>tant d’apporter <strong>une</strong> assistance dans le camp»pour les réfugiés devant d’abord être soignés.De son côté, depuis qu’elle a octroyé l’accès aux réfugiés fin mars, l’AFDL ne cesse de soufflerle chaud <strong>et</strong> le froid concernant les secours (parfois bloqués) <strong>et</strong> le rapatriement (sans cesse repoussé).Le 21 avril, celui-ci est toujours en négociation, <strong>et</strong> les ONG perdent l’accès aux camps suite àun pil<strong>la</strong>ge <strong>et</strong> à des affrontements, vraisemb<strong>la</strong>blement provoqués par les soldats AFDL.QUELLE COMMUNICATION SUR LES MASSACRES? - AVRIL 1997En parallèle, <strong>la</strong> <strong>question</strong> de <strong>la</strong> stratégie devant faire suite aux deux missions exploratoires defin mars, où <strong>la</strong> politique d’élimination est devenue évidente, est en discussion de façon trèsintense en interne.Sur le terrain à Bukavu, différentes positions sont exprimées selon <strong>la</strong> nature de l’activité dans<strong>la</strong>quelle les personnes sont engagées : l’équipe ayant effectué l’explo veut diffuser publiquement lesinformations ; l’équipe qui travaille dans des dispensaires auprès de réfugiés dans <strong>la</strong> zone estime quel’on ne peut m<strong>et</strong>tre en danger l’aide qu’on apporte à 10 000 personnes en prenant le risque d’êtreexpulsés ; <strong>une</strong> autre équipe engagée dans des actions de développement refuse de partir.La décision est prise par le siège (<strong>MSF</strong>-H) d’utiliser les informations rapportées par l’équipeexplo, mais pas publiquement : «Au-delà de <strong>la</strong> faiblesse de l’organisation, il y avait aussi l’idéequ’on ne pouvait pas utiliser le rapport Shabunda publiquement parce qu’on préférait continuer nosopérations même avec un accès limité » (entr<strong>et</strong>ien DirOp <strong>MSF</strong>-H). « Nous pensions que dans un telcas, avec des informations aussi sensibles, des opérations en cours <strong>et</strong> nos équipes sur le terrain, nousdevions gérer tout ce<strong>la</strong> sur un mode confidentiel (…) <strong>la</strong> décision de garder ce<strong>la</strong> confidentiel — c’est<strong>une</strong> demande du terrain au desk (…) le terrain était très inqui<strong>et</strong> » (entr<strong>et</strong>ien membre du HAD).Pourtant quelques jours plus tard, <strong>une</strong> membre du desk urgence arrivée sur le terrain le 14 avrilse rappelle que « l’équipe elle aussi a dit ‘nous devons le rendre public’ (…) J’étais contente <strong>et</strong> fière.Toute l’équipe pensait qu’on devait le faire » (entr<strong>et</strong>ien desk urgences <strong>MSF</strong>-H).C’est sur d’autres arguments que <strong>la</strong> DirCom de <strong>MSF</strong>-US prône <strong>une</strong> gestion prudente des informationsre<strong>la</strong>tives aux massacres : <strong>MSF</strong> «n’est pas Amnesty – nous ne sommes pas là pour transm<strong>et</strong>tre ce que les69
éfugiés ont à dire» «<strong>MSF</strong> n’a pas de preuve visuelle de première main de gens en train d’être massacrés(…) Voir des fosses comm<strong>une</strong>s n’est <strong>la</strong> preuve de rien (…) Les seules preuves que <strong>MSF</strong> peut fournir enrestant crédible sont des preuves médicales, en particulier depuis le déficit de crédibilité que nous avonsenregistré sur <strong>la</strong> crise post-Kivu de septembre à décembre 1996» (mémo, 9 avril). Elle préconise doncde briefer des journalistes sur les charniers afin qu’ils fassent <strong>la</strong> recherche eux-mêmes, de contacterdes ONGs de droits de l’homme pouvant faire un travail médico-légal, de prendre conseil auprès duterrain avant quelque prise de parole publique que ce soit.Autour du 10 avril, <strong>MSF</strong>-Hol<strong>la</strong>nde établit un «p<strong>la</strong>n de <strong>protection</strong> » fondé sur <strong>une</strong> « advocacy confidentielle». L’objectif énoncé est d’assurer <strong>la</strong> <strong>protection</strong> des popu<strong>la</strong>tions à risque ; améliorer «l’accèsopérationnel afin de faire baisser <strong>la</strong> mortalité ». Il se décline en objectifs « d’influencer » l’AFDL,le Rwanda <strong>et</strong> l’Ouganda afin de «contrôler les vio<strong>la</strong>tions » ; de contacter les gouvernements occidentauxsur l’accès <strong>et</strong> les massacres, pour qu’ils influencent ces acteurs afin «d’assurer <strong>une</strong> <strong>protection</strong>adéquate » des réfugiés <strong>et</strong> résidents ; de raviver les activités de <strong>protection</strong> du HCR ; d’assurerle maintien de ces <strong>question</strong>s à l’ordre du jour (presse), <strong>et</strong>c.La mise en œuvre commence avec des rencontres au plus haut niveau : Conseil de sécurité le16 avril, représentant spécial des Grands Lacs, briefings de l’équipe explo à des représentantsdes gouvernements occidentaux, de l’Union européenne… En introduction à ces rencontres,cinq «points d’inquiétude» sont présentés par <strong>MSF</strong>-H : le manque d’accès, le manque de <strong>protection</strong>,l’utilisation de l’aide comme appât, <strong>la</strong> nécessité de faire pression sur Kabi<strong>la</strong>, <strong>et</strong> enfin <strong>la</strong> nécessitéde s’assurer qu’<strong>une</strong> commission d’enquête sur les vio<strong>la</strong>tions des droits de l’homme soit bien miseen p<strong>la</strong>ce. L’insistance sur les faits, l’idée d’un témoignage basé sur <strong>la</strong> présence, <strong>la</strong> prudence surles éléments non objectivement confirmés, demeurent de mise (en atteste le briefing serré dispensépar le siège au coordinateur de <strong>la</strong> mission explo qui doit intervenir dans ces rencontres à hautniveau).Au même moment, le rapport Shabunda est finalisé <strong>et</strong> envoyé aux autres sections. <strong>MSF</strong> Belgique,qui a des équipes sur le terrain, conteste <strong>la</strong> forme du rapport, décrit a posteriori comme «faible »,« mal écrit »(«ce n’est pas parce que l’histoire s’est avérée que chaque fois qu’on a ce type d’indice,on peut témoigner », entr<strong>et</strong>ien DirOp <strong>MSF</strong>-B). Elle tente d’empêcher <strong>MSF</strong>-H d’aller rencontrerles personnes dans le cadre de son p<strong>la</strong>n d’advocacy. <strong>MSF</strong>-H suspend tout lobbying auprès dejournalistes « en raison des objections de <strong>MSF</strong>-B (<strong>la</strong> sécurité de l’équipe de Kigali pourrait êtrecompromise)(…) AUCUN JOURNALISTE NE SERA BRIEFE, AUCUN NE RECEVRA LE RAPPORT » (Pointcommunication, <strong>MSF</strong>-H, 18 avril).<strong>MSF</strong>-France, à l’inverse, est extrêmement choquée que des informations aussi décisives n’aientpas amené <strong>MSF</strong>-H à alerter les autres sections <strong>et</strong> réagir : « ce<strong>la</strong> veut dire que plus d’un mois aprèsles faits, auc<strong>une</strong> décision concrète ni opérationnelle ni publique n’a été prise sur <strong>la</strong> base d’<strong>une</strong> informationcomme celle-là ! je suis atterrée » (entr<strong>et</strong>ien Responsable juridique <strong>MSF</strong>-F) ; «ce qui faitsortir de <strong>la</strong> rumeur ce genre de suj<strong>et</strong> c’est quand <strong>une</strong> institution assume de dire qu’elle le croit vrai <strong>et</strong>assume de fournir les arguments avec lesquels elle étaye ses convictions. Auc<strong>une</strong> des institutionsconcernées, ni le HCR (…) ni le CICR, ni <strong>MSF</strong>-Hol<strong>la</strong>nde, n’a assumé sa position publiquement surun suj<strong>et</strong> aussi fondamental » (J-H Bradol, DirCom <strong>MSF</strong>-F).70A partir de ce moment, les différentes sections vont se confronter au quotidien sur les décisionsde stratégie : v<strong>et</strong>o de <strong>MSF</strong>-H sur un communiqué de presse sur le présent (afin de donner auxéquipes le temps de s’organiser), v<strong>et</strong>o de <strong>MSF</strong>-B sur le rapport Shabunda (levé après remaniement
- Page 1 and 2:
LES CAHIERS DU CRASHMSF ET LA PROTE
- Page 3 and 4:
DANS LA COLLECTIONDES CAHIERS DU CR
- Page 5 and 6:
RemerciementsJe tiens à remercier
- Page 7 and 8:
ANNEXESANNEXE 1: 53Etude de cas - T
- Page 9 and 10:
Variété des registres d’abord :
- Page 11 and 12:
négatives, indiquant l’ambivalen
- Page 14 and 15:
I - L’ÈRE DU TÉMOIN - SENTINELL
- Page 16 and 17:
Il n’est pourtant pas certain que
- Page 18:
Dureté des faits du côté des ré
- Page 21 and 22: Pendant cette période, MSF prend d
- Page 23 and 24: esponsabilités » (CA octobre 1992
- Page 25 and 26: la protection des populations civil
- Page 27 and 28: Ces deux événements uniques, cibl
- Page 29 and 30: témoignage, d’un côté l’assi
- Page 31 and 32: 30valeur encore accordée à la pr
- Page 33 and 34: Conséquence de cette volonté de r
- Page 35 and 36: impose un démarquage mais n’a pa
- Page 37 and 38: (RM 1999-2000). Un questionnement r
- Page 39 and 40: Par suite, chez la majorité de ceu
- Page 41 and 42: les plus instables en leur sein, ce
- Page 43 and 44: des hommes en armes pénétrèrent
- Page 45 and 46: De façon similaire, l’idée qu
- Page 47 and 48: personnes ne pouvant rentrer chez e
- Page 49 and 50: et visée «de protection». La mis
- Page 51 and 52: Fruit d’arbitrages complexes, d
- Page 53 and 54: cet espace qui devient parfois celu
- Page 55 and 56: PROLOGUE - 1996, AVANT L’AVANCEE
- Page 57 and 58: PROLOGUE - 1996, AVANT L’AVANCÉE
- Page 59 and 60: les violences sont évoquées en fi
- Page 61 and 62: - Alors que la pression des ONG (et
- Page 63 and 64: autres occasions : d’une part, l
- Page 65 and 66: ou produites): la moindre évidence
- Page 67 and 68: il a failli) : «face à ce bilan p
- Page 69: détourné : « Deux jours plus tar
- Page 73 and 74: éléments objectifs, validés. La
- Page 75 and 76: La tension entre présence et parol
- Page 77 and 78: l’apogée des tensions inter-sect
- Page 79 and 80: et les limites du processus de rapa
- Page 81 and 82: EPILOGUEDE LA CONSOLIDATION DES INF
- Page 84 and 85: ANNEXE N ° 2 / ÉTUDEDECASINTERVEN
- Page 86 and 87: Comme dans le document sur la « Tr
- Page 88 and 89: d’assistance dans les villages pr
- Page 90 and 91: MORNAY, AU CŒUR DES VIOLENCES, UNE
- Page 92 and 93: Cet appel à prendre ses responsabi
- Page 94 and 95: C’est ensuite autour du poids res
- Page 96 and 97: déplacés fuient les «attaques de
- Page 98 and 99: importants. Selon leur conception d
- Page 100 and 101: embarrassante (celle par les tenant
- Page 102 and 103: de leur impact sur la population ;
- Page 104 and 105: (p.57-60). La question a donc été
- Page 106 and 107: situation. Nous prolongerons les re
- Page 108 and 109: LE DÉBAT AUTOUR DES VICTIMES PRIOR
- Page 110 and 111: ANNEXE N ° 3 / ÉTUDEDECASPRISE EN
- Page 112 and 113: La présente étude de cas porte su
- Page 114 and 115: Promesses non tenues - un semblant
- Page 116 and 117: logistique. Le projet Kayna, dont l
- Page 118 and 119: part, en dehors de ces moments sail
- Page 120 and 121:
2 - ACTES, PRATIQUES, AUTOUR DE / F
- Page 122 and 123:
violer / être exclue par mon mari
- Page 124 and 125:
Concrètement, nous parlons ici de
- Page 126 and 127:
collective », de sensibiliser diff
- Page 128 and 129:
à des appels : le 12 mai, Oxfam ap
- Page 130 and 131:
éclairer la suite. Il nous semble
- Page 132 and 133:
A chaque fois, ils voient mal quell
- Page 134 and 135:
le coordinateur Nord Kivu disait é
- Page 136 and 137:
ANNEXE N ° 4OCCURRENCES DE MOTS-CL
- Page 138 and 139:
le problème réel n’est pas celu
- Page 140 and 141:
CA 2 mars 2001 :Guinée-Sierra Leon
- Page 142 and 143:
faut dénoncer les atteintes au dro
- Page 144 and 145:
coller le plus possible au médical
- Page 146 and 147:
OCCURRENCES DU MOT «CIVILS / POPUL
- Page 148 and 149:
RM 2000-2001 :« L’intervention m