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Jamais moi sans toi

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30 L ES FONDEMENTS<br />

plus pertinent lorsque les rêveries et les émotions de l’analyste sont<br />

en correspondance avec ces fantasmes que lepatient ne parvient pas à<br />

traduire dansune forme langagièrefaute deressourcessuffisantesdans<br />

son préconscient.Lefonctionnementmentaldupatientest parfoismisà<br />

mal par la nature violente del’un deces fantasmes. Cesont comme des<br />

fragments d’idées àlarecherche d’un auteur. Les produits des moments<br />

d’évasion (des rêves diurnes) hors de l’attention flottante constituent<br />

pour l’analystedeséléments précieux quileconduisentàdespistesqui<br />

autrement ne seraient pas accessibles. Plus encore, Th. Ogden considère<br />

quelafonctiondel’analyseest de permettrelarestauration de la capacité<br />

onirique chez le patient. Ildit même que ceserait son but essentiel, ce<br />

quiest plus discutable. Qu’en serait-il alors pour nospatients névrosés,<br />

quipossèdentune capacitéoniriquedéveloppéeetquipourtantsonten<br />

souffrance ?Ogden semble inspiré par l’idée que letravail en séance<br />

reprend oureproduitle travaildurêve, mais la nouveautéqu’il propose<br />

est quecetravailse faitàdeux.<br />

W. Bion (1964, 1975) veut souligner la portée del’entre-deux du<br />

champ analytique. Une bonne interprétation n’a pas d’auteur, dit-il,<br />

comme d’ailleurs toute idée qui s’avère juste. Ce serait le groupe qui<br />

produit les idées et non les auteurs affichés, notion qui, appliquée au<br />

groupe analyste/patient,mérite toutenotre attention. Ce n’est pas que le<br />

lien analytiquemanque d’épaisseur ou nage dans la confusion, mais il a<br />

aucontraireune identitéaffirmée, quidépend plus de l’ensemblecomme<br />

construction àdeux que del’un oude l’autre, même si lacontribution<br />

de chacun est tout àfait reconnaissable. Il convient toutefois de ne pas<br />

confondre celui qui formule une interprétation et le processus qui la<br />

façonne.<br />

En relativisant le concept de vérité etde création ou d’auteur d’une<br />

idée, Th. Ogden (2003a )reprend ces notions et les développe en évoquant<br />

que lavérité est toute relative, que les idées sont d’autant plus<br />

justes qu’elles ne sont pas la propriété d’un individu. Ilcite Jorge Luis<br />

Borges(1956)qui, àl’instard’autresécrivains,arevendiquéledroitau<br />

plagiat, parce qu’il lui semblait difficile de distinguer,dans ses œuvres,<br />

ce qu’il avait rédigé de sa propre inspiration et ce que ses innombrables<br />

lecturesluiavaientsuggéréaupointde lesavoirrecopiéesàson insu.<br />

Dans une conférence sur l’immortalité, J.L. Borges (1980)précise sa<br />

pensée :lorsqu’il déclame la poésie d’un auteur anglais du IX e siècle,<br />

peu importe qui fut ce poète. «Ilvit en <strong>moi</strong> àce moment. »De même,<br />

les mots et les tournures prononcés dans salangue sont ces mêmes mots<br />

ettournuresqu’une multitude aprononcésavantlui ;il yen aurad’autres<br />

qui leferont après lui. Ils sont tous présents en lui àcemoment-là.

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