Jamais moi sans toi
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36 L ES FONDEMENTS<br />
Rappelant le recentrement qu’opère l’introduction du concept de<br />
signifianténigmatique, J. Laplanche(1991, p. 1312)va encoreplus loin<br />
dansla qualificationdel’effetincitatif queconstituel’énigme de l’autre.<br />
Il souligne :<br />
« À côté delaréalité perceptive etàcôté delaréalité psychologique, dont<br />
la fantaisie inconsciente consciente-préconsciente constitue un secteur<br />
majeur, ilyaurait àposer, comme troisième réalité, celle dumessage,<br />
c’est-à-dire celle dusignifiant en tant qu’il est adressé par quelqu’un à<br />
quelqu’un. »<br />
D EQUELLE LIBIDO S ’ AGIT- IL ?<br />
L’investissement d’objet étant àlabase delaliaison intersubjective,<br />
je crois que c’est le moment de souligner que cette libido n’est pas<br />
seulement d’expression masculine comme lepense Freud (1932), mais<br />
aussi féminine, en provoquant une vibration réceptive etd’absorption,<br />
qui peut aller jusqu’au bouleversement. Cequi est inconnu chez l’autre,<br />
ce qui est étrange, cequi semble vide éveille un attrait libidinal, un<br />
appétit de connaissance et unsouci de vérité (sauf quand ilanéantit le<br />
sujet comme danscertainesexpériencesanti-connaissance).<br />
Le fémininintervientdansle lien pour la réceptiondel’autre. Avant<br />
de reconnaîtreceque ditl’autre, lorsqu’il sentl’impactde sa présence et<br />
entrevoiecequil’agiteetl’interroge, le sujetsedemande pourquoi l’autre<br />
exprime ce qu’il exprime,pourquoi àlafoisil l’attireetil portesonamour<br />
ailleurs ( cuoi voi ? ) . Parfois il est étonné, un sentiment d’étrangeté le<br />
prend aucœur, ilpense que jamais il ne s’est vu aussi déstabilisé face<br />
àun quelconque tiers. Lesujet essaye delecerner, delesentir, tout en<br />
déchiffrantlessensationsqu’il éveille en lui. Dumême coup, il s’oublie ;<br />
son identitéest altérée, ses limitespersonnelles peuvent êtredéplacées<br />
et perméables :tout cela se produit en même temps qu’il est identifié<br />
au message del’autre etàson énonciation, c’est-à-dire «avec l’autre<br />
comme sujet »(lien narcissique). Cette reconnaissance première n’est<br />
que ledébut d’un long parcours (Ricœur, 2004). À ce moment-là, une<br />
identification centripète (vers le <strong>moi</strong>) est en cours. Pour identifier le<br />
message, il est nécessaire del’extraire d’un ensemble demessages, de<br />
l’isoler et de le comparer àd’autres notions pour repérer ce qui les<br />
différencie. «Distinguer ce quelque chose, qu’il soit idée, chose ou<br />
personne,c’est l’identifier », souligneP.Ricœur (2004, p. 49).Maisce<br />
processus risque derendre méconnaissable ce qui était àidentifier s’il<br />
fait apparaître un trait inconnu ou siletemps l’a trop changé. Unessai