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Jamais moi sans toi

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L ARECONNAISSANCE DELADIFFÉRENCE 61<br />

© Dunod –Laphotocopienon autorisée est un délit<br />

jeter unregard trop froid sur lui. Il peut craindre d’être une proie pour<br />

satisfaire des appétits financiers. Dans ce cas, lesoupçon se fomente,<br />

l’isolement s’accentue, le repli sur les proches et les co-nationaux se fait<br />

tenace. La crainte deladifférence se manifeste depart et d’autre. Elle<br />

n’a pasle même contenu,certes,maisla supérioritéressentie etaffichée<br />

ne contribueguèreàl’intégration.<br />

Si les références culturelles permettent de nourrir l’estime desoi et<br />

la dignité dès la prime enfance, cela se complique dès lors qu’elles<br />

sont entenduescomme signedesupérioritéàla fois chez le majoritaire<br />

et chez le minoritaire. La question dunarcissisme est au centre dela<br />

reconnaissance mutuelle. Le citoyen de la majorité doit intégrer l’idée<br />

que lenarcissisme du minoritaire exige qu’on le laisse se développer<br />

en contact avec sa culture. Cedernier doit àson tour admettre qu’il<br />

peut froisser le narcissisme du majoritaire. Sa propre subjectivation<br />

est enrichie par le contact avec son identité culturelle certes, mais,<br />

en même temps, vivre enrelation avec différents milieux permet au<br />

sujet de démythifier saculture etde ne plus juger les réponses aux<br />

problèmesde l’existencequ’il atrouvécomme lesseulesexistantesou<br />

les plus pertinentes. Delàl’importance que peut revêtir l’adoption des<br />

principesetoptionsde l’autrequand ceux-ci s’avèrentplus opérationnels.<br />

Reconnaîtreladifférencepasseraiten somme parl’identificationàl’autre<br />

<strong>sans</strong> pour autantperdresa singularitéoula déprécier.<br />

La haine de soi s’inscrit parfois dans le parcours de nombre desujets<br />

minoritaires.Ils estimentqueleur différence entrave leur destin,vivent<br />

certainstraits physiquescomme desstigmates,croientquedesaspects de<br />

leur personnalitésonttypiquesde leur cultured’origine etquientravent<br />

leur succès social. À cela contribue certainement la disqualification<br />

venantd’une sociétéhostile etraciste, ce quiaccentuelejugementnégatif<br />

quel’on adesoi-même.<br />

En réaction, la voie dufaux-self façonne des êtres conformistes qui<br />

imitentle modèle ducitoyen robot( cf. Eiguer,1998).Comme réaction<br />

positive, estime M. Wievorka ( op. cit.,p.126), «lerenversement du<br />

stigmate comporte nécessairement deux dimensionsentremêlées. Ilest<br />

àlafois travail de l’acteur sur lui-même, et confrontation àla société,<br />

réaction au regard invalidant qu’elle portait sur lui jusque-là ou qu’il<br />

percevaitcomme tel. Il met fin, selon le mot de Sartre [1943], àlahonte<br />

comme “conscience de soi sous le regardd’autrui” ».<br />

Le minoritaireest amenéàréaliserundoubletravaildereconnaissance.<br />

Il devra se reconnaître dans les autres membres de sa communauté et<br />

reconnaître enquoi les ressources de son groupe lui ont assuré des

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