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Les liaisons dangereuses - Ebooks libres et gratuits

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Je suis tellement libre, que je n'ai seulement pas négligé la p<strong>et</strong>ite Volanges, à laquelle pourtant je tiens si<br />

peu. Sa mère la ramène à la Ville dans trois jours ; <strong>et</strong> moi, depuis hier, j'ai su assurer mes communications :<br />

quelque argent au portier <strong>et</strong> quelques fleur<strong>et</strong>tes à sa femme en ont fait l'affaire. Concevez−vous que Danceny<br />

n'ait pas su trouver ce moyen si simple ? <strong>et</strong> puis, qu'on dise que l'amour rend ingénieux ! il abrutit au<br />

contraire ceux qu'il domine. Et je ne saurais pas m'en défendre ! Ah ! soyez tranquille. Déjà je vais, sous<br />

peu de jours, affaiblir, en la partageant, l'impression peut−être trop vive que j'ai éprouvée ; <strong>et</strong> si un simple<br />

partage ne suffit pas, je les multiplierai.<br />

Je n'en serai pas moins prêt à rem<strong>et</strong>tre la jeune pensionnaire à son discr<strong>et</strong> Amant, dès que vous le<br />

jugerez à propos. Il me semble que vous n'avez plus de raison pour l'en empêcher ; <strong>et</strong> moi, je consens à<br />

rendre ce service signalé au pauvre Danceny. C'est, en vérité, le moins que je lui doive pour tous ceux qu'il<br />

m'a rendus. Il est actuellement dans la grande inquiétude de savoir s'il sera reçu chez Madame de Volanges ;<br />

je le calme le plus que je peux, en l'assurant que, de façon ou d'autre, je ferai son bonheur au premier jour :<br />

<strong>et</strong> en attendant, je continue à me charger de la correspondance, qu'il veut reprendre à l'arrivée de sa Cécile .<br />

J'ai déjà six L<strong>et</strong>tres de lui, <strong>et</strong> j'en aurai bien encore une ou deux avant l'heureux jour. Il faut que ce garçon−là<br />

soit bien désoeuvré !<br />

Mais laissons ce couple enfantin, <strong>et</strong> revenons à nous ; que je puisse m'occuper uniquement de l'espoir si<br />

doux que m'a donné votre L<strong>et</strong>tre. Oui, sans doute vous me fixerez, <strong>et</strong> je ne vous pardonnerais pas d'en douter.<br />

Ai−je donc jamais cessé d'être constant pour vous ? Nos liens ont été dénoués, <strong>et</strong> non pas rompus ; notre<br />

prétendue rupture ne fut qu'une erreur de notre imagination : nos sentiments, nos intérêts n'en sont pas moins<br />

restés unis. Semblable au voyageur, qui revient détrompé, je reconnaîtrai comme lui que j'avais laissé le<br />

bonheur pour courir après l'espérance <strong>et</strong> je dirai comme d'Harcourt :<br />

Plus je vis d'étrangers, plus j'aimai ma patrie [Du Belloi, Tragédie du Siège de Calais]<br />

Ne combattez donc plus l'idée ou plutôt le sentiment qui vous ramène à moi ; <strong>et</strong> après avoir essayé de<br />

tous les plaisirs dans nos courses différentes, jouissons du bonheur de sentir qu'aucun d'eux n'est comparable<br />

à celui que nous avions éprouvé, <strong>et</strong> que nous r<strong>et</strong>rouverons plus délicieux encore !<br />

Adieu, ma charmante amie. Je consens à attendre votre r<strong>et</strong>our : mais pressez−le donc, <strong>et</strong> n'oubliez pas<br />

combien je le désire.<br />

Paris, ce 8 novembre 17**.<br />

<strong>Les</strong> <strong>liaisons</strong> <strong>dangereuses</strong><br />

LETTRE CXXXIII 226

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