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Les liaisons dangereuses - Ebooks libres et gratuits

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LETTRE CLVIII<br />

LE VICOMTE DE VALMONT A LA MARQUISE DE MERTEUIL<br />

(A SON REVEIL.)<br />

Eh bien, Marquise, comment vous trouvez−vous des plaisirs de la nuit dernière ? n'en êtes−vous pas un<br />

peu fatiguée ? Convenez donc que Danceny est charmant ! Il fait des prodiges, ce garçon−là. Vous<br />

n'attendiez pas cela de lui, n'est−il pas vrai ? Allons, je me rends justice, un pareil rival méritait bien que je<br />

lui fusse sacrifié. Sérieusement, il est plein de bonnes qualités ! Mais surtout, que d'amour, de constance, de<br />

délicatesse ! Ah ! si jamais vous êtes aimée de lui comme l'est sa Cécile, vous n'aurez point de rivales à<br />

craindre : il vous l'a prouvé c<strong>et</strong>te nuit. Peut−être à force de coqu<strong>et</strong>terie, une autre femme pourra vous<br />

l'enlever un moment ; un jeune homme ne sait guère se refuser à des agaceries provocantes : mais un seul<br />

mot de l'obj<strong>et</strong> aimé suffit, comme vous voyez, pour dissiper c<strong>et</strong>te illusion ; ainsi il ne vous manque plus que<br />

d'être c<strong>et</strong> obj<strong>et</strong>−là pour être parfaitement heureuse.<br />

Sûrement vous ne vous y tromperez pas ; vous avez le tact trop sûr pour qu'on puisse le craindre.<br />

Cependant l'amitié qui nous unit, aussi sincère de ma part que bien reconnue de la vôtre, m'a fait désirer pour<br />

vous l'épreuve de c<strong>et</strong>te nuit ; c'est l'ouvrage de mon zèle ; il a réussi : mais point de remerciements ; cela<br />

n'en vaut pas la peine : rien n'était plus facile.<br />

Au fait, que m'en a−t−il coûté ? un léger sacrifice, <strong>et</strong> quelque peu d'adresse. J'ai consenti à partager<br />

avec le jeune homme les faveurs de sa Maîtresse : mais enfin il y avait bien autant de droit que moi ; <strong>et</strong> je<br />

m'en souciais si peu ! La L<strong>et</strong>tre que la jeune personne lui a écrite, c'est bien moi qui l'ai dictée ; mais c'était<br />

seulement pour gagner du temps, parce que nous avions à l'employer mieux, celle que j'y ai jointe, oh ! ce<br />

n'était rien, presque rien ; quelques réflexions de l'amitié pour guider le choix du nouvel Amant : mais en<br />

honneur, elles étaient inutiles ; il faut dire la vérité, il n'a pas balancé un moment.<br />

Et puis, dans sa candeur, il doit aller chez vous aujourd'hui vous raconter tout ; <strong>et</strong> sûrement ce récit−là<br />

vous fera grand plaisir ! il vous dira : Lisez dans mon cour ; il me le mande : <strong>et</strong> vous voyez bien que cela<br />

raccommode tout. J'espère qu'en y lisant ce qu'il voudra, vous y lirez peut−être aussi que les Amants si jeunes<br />

ont leurs dangers ; <strong>et</strong> encore, qu'il vaut mieux m'avoir pour ami que pour ennemi.<br />

Adieu, Marquise ; jusqu'à la première occasion.<br />

Paris, ce 6 décembre 17**.<br />

<strong>Les</strong> <strong>liaisons</strong> <strong>dangereuses</strong><br />

LETTRE CLVIII 265

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