13.07.2013 Views

Le Bloc

Le Bloc

Le Bloc

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

10<br />

Mafé poisson… J’aurais peut-être dû accepter une assiette,<br />

finalement, de ces Sénégalais. Je n’ai rien mangé depuis<br />

l’arrivée des comiques rue Brézin. Et, même si je n’ai pas faim, il<br />

faudrait tout de même que j’avale quelque chose. J’ai toujours<br />

mal à la gorge à cause de ce con de Gros Luc, mais il serait sans<br />

doute utile d’avoir un peu d’énergie pour la dernière ligne droite<br />

avec Ravenne et les Delta boys, pour le duel au soleil…<br />

Je me retourne, je mets mon nez dans l’oreiller, comme à<br />

Denain, dans la chambre que je partageais avec Hélène, quand<br />

je voulais faire comme si le monde n’existait plus, comme si, en<br />

restant comme ça assez longtemps, quand je rouvrirais les yeux<br />

ce ne serait plus cette chambre envahie de plein de trucs de fille,<br />

poupées, dînettes, mais surtout de toutes ces petites boîtes, ces<br />

dizaines de petites boîtes avec des trucs idiots dedans, des<br />

perles de pacotille, des colliers bousillés depuis longtemps, des<br />

tickets de cinéma ou des pièces de monnaie belges.<br />

Non, ne pas penser encore à Denain.<br />

Repenser à mes débuts au <strong>Bloc</strong>, par exemple, à ce vieux<br />

guerrier de Molène.<br />

Je me revois, allez savoir pourquoi, sans doute parce que la<br />

journée devait être lumineuse, début 91, en train de surveiller<br />

des recrues du GPP qui faisaient des exercices dans la salle de<br />

gym du Bunker. Je crois bien que les opérations terrestres<br />

avaient déjà commencé contre l’Irak. <strong>Le</strong>s gars enchaînaient les<br />

pompes sur deux bras, sur un bras, sur un autre bras. Et ils<br />

recommençaient. Jusqu’à épuisement. J’aimais l’odeur de leur<br />

effort, j’aimais la sueur qui trempait leurs tee-shirts. Ils me<br />

haïssaient comme on hait toujours celui qui vous entraîne, celui<br />

qui vous oblige à avoir mal, et puis à la fin vous l’aimez parce<br />

que vous vous apercevez qu’il vous a suffi d’un seul coup de<br />

poing pour que le type en face de vous ne se relève pas. Ou que<br />

vous n’avez ressenti aucune courbature quand vous êtes allé<br />

168

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!