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Kop de Boulogne, étaient beaucoup plus méfiants. Ils ne<br />
voyaient pas qui pouvait être ce mec.<br />
— C’est pas un flic, chef ? demandaient-ils parfois à Stanko.<br />
— Dis, merdeux, tu me prends pour un con ?<br />
Vous vous équipiez. <strong>Le</strong>s skins restaient comme ils étaient et<br />
se contentaient d’une cagoule. <strong>Le</strong>s GPP, Stanko et toi, vous<br />
enfiliez des treillis noirs sans marques distinctives. Toujours un<br />
peu mythomane, Stanko racontait qu’ils venaient de Serbie et<br />
qu’ils faisaient partie des surplus des tigres d’Arkan, le chef de<br />
guerre serbe recherché par le TPI et assassiné par on ne savait<br />
trop qui en sortant d’un palace de Belgrade. Que des camarades<br />
proserbes du <strong>Bloc</strong>, qui avaient combattu contre les Bosnioules<br />
assiégés dans Sarajevo, les avaient rapportés en souvenir.<br />
Ensuite, des cagoules pour vous aussi. <strong>Le</strong>s matraques, les<br />
poings américains, les nunchakus, un gros extincteur lacrymo<br />
dont se chargeait Stanko. Toi, les nunchs, tu évitais, tu n’avais<br />
jamais trop su t’en servir, malgré les cours de Stanko dans les<br />
salles d’entraînement du Bunker. Tu te retrouvais toujours à la<br />
limite de t’éborgner. Stanko, qui était pourtant patient avec toi,<br />
avait renoncé.<br />
Tu aimais la testostérone presque palpable qui se concentrait<br />
dans un espace aussi confiné, se mêlant aux shoots<br />
d’adrénaline. Parfois, un jeune mec poussait un hurlement bref,<br />
comme ça, sans raison. Une sorte d’aboiement. On y sentait<br />
l’impatience du combat, le désir de violence.<br />
Tu devinais ce qu’il en était, au fond, de ces petits mecs : une<br />
génération élevée dans le virtuel, dans la crainte du sida, des<br />
étrangers, du chômedu, de la précarité, dans la paupérisation<br />
honteuse des zones pavillonnaires. <strong>Le</strong> temps pour rien qui<br />
s’abîmait dans des jeux vidéo, les séances de branlette collective<br />
dans les piaules, ou, quand on avait de la chance, les filles d’à<br />
côté qui ne savaient plus faire l’amour qu’en mimant ce qu’elles<br />
avaient vu dans trop de films pornos.<br />
Dans ces moments-là, en revanche, quand vous vous<br />
prépariez au combat, à ses risques, à ses incertitudes, et que<br />
sous les ordres de Stanko chacun savait exactement ce qu’il<br />
avait à faire, ils trouvaient à nouveau le goût du réel, ils se<br />
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