Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
elle était très médiatique. Une femme mince, élégante, un<br />
éternel chignon blond qui durcissait ses traits. Célibataire mais<br />
pas lesbienne. Et pourtant, on avait cherché. Elle avait un QI de<br />
150 et la mégalomanie qui allait avec.<br />
Louise Burgos, les médias disaient que c’était le nouveau<br />
visage du <strong>Bloc</strong>. Plus froid, plus technocratique, mais plus<br />
efficace. Avec ses copains des grandes écoles, dans les<br />
années 70, elle avait fondé un club de réflexion très influent, la<br />
fondation La Passerelle. On ne disait pas encore think tank.<br />
Ils voulaient donner à la droite des idées moins molles. Ils<br />
avaient pris des places dans certains grands corps de l’État,<br />
dans des journaux de la droite classique. Ils repeignaient aux<br />
couleurs de la France des seventies des idées sur l’inégalité des<br />
races et des individus directement héritées d’Alexis Carrel.<br />
Antoine m’a bien expliqué. Pas étonnant que Louise Burgos et<br />
ses potes m’aient toujours regardé comme une merde lors des<br />
réunions du comité central. Ils voulaient construire une société<br />
où la hiérarchie se serait calquée sur les aptitudes biologiques<br />
de certains. Sans compter une hygiène raciale très stricte avec<br />
eugénisme et stérilisation. Ils auraient eu du boulot, du côté de<br />
Denain. Et pas seulement chez les bougnoules.<br />
Malgré leurs allures bien propres, bien compétentes, Louise<br />
Burgos et ses petits copains de La Passerelle, ils ont bien vu que<br />
la droite classique, elle avait plutôt du mal à digérer ce genre<br />
d’idéologie. Alors ils sont arrivés en masse dans les instances<br />
dirigeantes du <strong>Bloc</strong>.<br />
Dorgelles n’a pas voulu voir leurs ambitions, seulement<br />
qu’ils apportaient un crédit scientifique, technocratique au <strong>Bloc</strong>,<br />
un parti qui faisait encore quand même assez bande<br />
d’aventuriers nationalistes, d’illuminés catholiques, de<br />
royalistes en dissidence et autres amateurs de baroud<br />
sympathiquement courageux et batailleurs mais assez peu<br />
crédibles. Sans compter les mecs dans mon genre, des<br />
délinquants du Lumpenproletariat, comme elle disait, Louise<br />
Burgos, lors de certaines réunions où, si j’étais là, elle me fixait<br />
avec insistance.<br />
209