etudes binchoises revue de la société d'archéologie et des amis du ...

Deux émeutes à Binche
en mai 1812
Nous reprenons d'abord le texte d'une lettre adressée, le 7 juin
1812, par Pierre de Laussat, préfet du département de Jemappes, à M. le
Comte Réal, conseiller d'Etat à Paris, chargé du 1er arrondissement de
la Police générale. Cette lettre a l'avantage, en effet, de donner un
résumé des événements. Nous la ferons suivre alors (bien que leur date
soit antérieure) de trois autres lettres envoyées par Stanislas Troye,
sous-préfet de l'arrondissement de Charleroi, à Nicolas Coquiart, maire
de Binche:
Monsieur le Comte,
Mons, le 7 juin 1812
Deux émeutes qui ont eu lieu successivement dans la ville de Binche
me paraissent de nature à être portées à votre connaissance.
Le 29 mai dernier, une voiture chargée de grains traversant la ville
pour se rendre à la Halle de Mons, en vertu d'une autorisation du sous-préfet
de Charleroy, la populace s'est rassemblée et a voulu s'opposer à la sortie de ces
grains. Les conducteurs ont été maltraités.
Le surlendemain, 31 mai, entre 8 et 9 heures du soir, une femme fut
arrêtée, introduisant en fraude deux kilogrammes de tabac. Les employés des
droits réunis qui la conduisaient furent aussitôt suivis par une foule
considérable. Le garde-champêtre ayant mené cette femme dans la maison
d'arrêt, le peuple s'y porta et jeta plusieurs pierres contre la porte de la prison.
Le receveur des droits réunis prétend que des pierres ont aussi été
jetées contre les fenêtres de sa maison et ont brisé les vitres, mais ce rapport est
contredit par ceux que je reçois du Maire.
La Gendarmerie s'étant transportée immédiatement sur les lieux a
dissipé ces attroupements et l'ordre a été aussitôt rétabli.
Sur le compte qui me fut rendu, je dénonçai l'un et l'autre de ces délits
au Procureur Impérial criminel. Dix-neuf personnes ont été depuis lors arrêtées
et conduites dans la maison d'arrêt de Charleroy.
Le peuple de Binche est turbulent et se rassemble au moindre bruit.
Cette ville a cependant toujours fait preuve de soumission aux lois et
notamment à celles relatives à la conscription.
Les événements qui viennent d'avoir lieu ne doivent donc inspirer
aucune inquiétude. Des ordres ont été donnés pour que le Service de vigilance
redouble d'activité dans cette partie du département.
Agréez, Monsieur le Comte, l'assurance de ma haute considération.
(ARCHIVES NATIONALES DE FRANCE A PARIS, F 7, 3692, dossier 159 R3).
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