etudes binchoises revue de la société d'archéologie et des amis du ...

Les réactions des habitants du canton de Binche face aux
élections des années 1797-1799, on a pu s'en convaincre, ont été fort
complexes, et il n'est pas toujours facile de discerner l'évolution des
tendances qui s'y sont fait jour. Peut-être, pour y voir plus clair, serait-il
bon de jeter un coup d'oeil sur la politique suivie en ce domaine par les
autorités civiles elles-mêmes tout au long de ces temps troubles. C'est
ce que nous allons essayer de faire à la fin de cette étude pourtant déjà
bien longue. Interrogeons donc les princinaux responsables et
demandons-leur comment ils ont eux-mêmes jugé les événements
auxquels nous avons pu assister.
Un des tout premiers témoins, en l'occurrence, est certainement
le Commissaire départemental Pierre Delneufcour (144). Comme tous
les commissaires du Directoire, Delneufcour devait envoyer
régulièrement un rapport décadaire au ministre de l'Intérieur à Paris
pour faire connaître à celui-ci la situation du département. Parmi tous
ces rapports, il en est un qui est particulièrement à retenir, c'est celui du
6 nivôse an VI (26 déc. 1797) parce qu'il nous offre une vue synthétique
de tout ce qui a suivi les élections de l'an V (145). Delneucour insiste
d'abord sur l'hostilité à l'égard du Directoire qui s'est manifestée au
lendemain de ces élections chez "les nouveaux administrateurs choisis
en haine du Gouvernement et dans les Tribunaux formés pour
renverser la République" qui, tous ensemble "flattoient des préjugés du
peuple, crioient au terrorisme, accusoient leurs prédécesseurs d'avoir
grevé d'impôts et d'emprunts leurs administrés". Heureusement, dit le
Commissaire, le coup d'état du 18 fructidor mit un terme à cet essai
d'instauration d'un nouvel ordre politique, et redressa la barre de
manière à pouvoir contrer une fois pour toutes l'influence persistante
du sacerdoce "cette peste sociale" . C'est aux prêtres, en effet, que
Delneufcour s'en prend particulièrement, la noblesse lui semblant
moins à craindre pour les raisons qu' il expose nettement : "La noblesse
des 9 départements réunis n'était point trop ennemie de la révolution;
elle était commerçante . Mais dans ce département, dans le Hainaut (le
jardinet de la noblesse), elle était dignitaire et recherchait les emplois ;
par suite, elle est intrigante; l'exclusion des fonctions publiques l'a
atterrée. Il en résultera un bon effet; elle deviendra manufacturière et
commerçante" . Quant au peuple "né dans un pays presque libre", il a
vu "tout à coup des commissaires de tout genre, des engeances de
commerce, enlever le bétail, les marchandises, et ruiner tout le monde;
il a le coeur ulcéré". Tout danger n'est donc pas écarté, et, à la fin de son
rapport, Delneufcour propose même de supprimer purement et
simplement les prochaines élections dans les départements réunis, de
manière à permettre aux républicains déjà en place de poursuivre et de
consolider l'oeuvre de réunification entreprise. Les arguments
présentés par le Commissaire départemental pour justifier sa
proposition méritent d'être cités : "Une administration quelconque,
pour suivre des plans, doit avoir toujours le même esprit, et cela ne
peut être qu'en lui conservant un corps. Je sais bien qu'on dira : mais les
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