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le sud-ouest ; il s’offrit lui-même d’être de la partie avec un de<br />
ses amis, et de me fournir une petite barque.<br />
Gloubbdoubdrib, selon son étymologie, signifie l’île des<br />
Sorciers ou Magiciens. Elle est environ trois fois aussi large que<br />
l’île de Wight et est très fertile. Cette île est sous la puissance du<br />
chef d’une tribu toute composée de sorciers, qui ne s’allient<br />
qu’entre eux et dont le prince est toujours le plus ancien de la<br />
tribu. Ce prince ou gouverneur a un palais magnifique et un<br />
parc d’environ trois mille acres, entouré d’un mur de pierres de<br />
taille de vingt pieds de haut. Lui et toute sa famille sont servis<br />
par des domestiques d’une espèce assez extraordinaire. Par la<br />
connaissance qu’il a de la nécromancie, il a le pouvoir d’évoquer<br />
les esprits et de les obliger à le servir pendant vingt-quatre<br />
heures.<br />
Lorsque nous abordâmes à l’île, il était environ onze heures<br />
du matin. Un des deux gentilshommes qui m’accompagnaient<br />
alla trouver le gouverneur, et lui dit qu’un étranger souhaitait<br />
d’avoir l’honneur de saluer Son Altesse. Ce compliment fut bien<br />
reçu. Nous entrâmes dans la cour du palais, et passâmes au<br />
milieu d’une haie de gardes, dont les armes et les attitudes me<br />
firent une peur extrême ; nous traversâmes les appartements et<br />
rencontrâmes une foule de domestiques avant que de parvenir à<br />
la chambre du gouverneur. Après que nous lui eûmes fait trois<br />
révérences profondes, il nous fit asseoir sur de petits tabourets<br />
au pied de son trône. Comme il entendait la langue des<br />
Balnibarbes, il me fit différentes questions au sujet de mes<br />
voyages, et, pour me marquer qu’il voulait en agir avec moi sans<br />
cérémonie, il fit signe avec le doigt à tous ses gens de se retirer,<br />
et en un instant (ce qui m’étonna beaucoup) ils disparurent<br />
comme une fumée. J’eus de la peine à me rassurer ; mais, le<br />
gouverneur m’ayant dit que je n’avais rien à craindre, et voyant<br />
mes deux compagnons nullement embarrassés, parce qu’ils<br />
étaient faits à ces manières, je commençai à prendre courage, et<br />
racontai à Son Altesse les différentes aventures de mes voyages,<br />
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