n3-al-mukhatabat-journal
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caractérsisation de l’idéologie (et de ses notions) est dans cet ouvrage de<br />
Badiou loin d’être claire, elle oscille entre un niveau préconceptuel et une<br />
rechute conceptuelle, cette dernière s’opposant à la véritable « science des<br />
idées » que serait la philosophie 299 .<br />
Badiou prétend libérer le concept de modèle de son asservissement<br />
idéologique. Tâche ardue, cet asservissement étant un monstre à mille têtes: il<br />
oscille du scientisme d’un neo-positiviste logique comme Carnap jusqu’au<br />
pseudo-scientifisme d’un anthropologue comme Lévi-Strauss. Mais pour Badiou<br />
ces deux zouaves antipodiques commettent un identique pêché qui est une tare<br />
typiquement idéologique. Notre philosophe va trancher d’entrée, en un seul<br />
coup, les mille têtes du dragon idéologique en an<strong>al</strong>ysant music<strong>al</strong>ement leur<br />
illusoire multiplicité et en décrivant la quintessence de la tare idéologique, cela<br />
au cours du chapitre 1 (Quelques préliminaires concernant l’idéologie) qui<br />
constitue donc une <strong>al</strong>léchante mise en bouche, qui sera suivie d’une<br />
dégustation lente des écervelés.<br />
La base de la notion idéologique de modèle tant d’un point de vue<br />
anthropologique que d’un point de vue positiviste est la différence entre ré<strong>al</strong>ité<br />
empirique et forme théorique. Cette différence va donner lieu à tout un jeu<br />
intellectuel : <strong>al</strong>ors que par exemple Carnap prétend réduire cette différence via<br />
le physic<strong>al</strong>isme, Quine lui nie cette différence avec son slogan « Être, c’est être<br />
la v<strong>al</strong>eur d’une variable », mais cette négation comme le montre bien Badiou,<br />
n’a de se sens que par rapport à la différence originelle. Et Badiou ajoute : «<br />
L’instabilité de cette différence, sa perpétuelle renaissance-niée » mennent à<br />
une « agitation discursive qui déplace à l’infini la place essentiellement vide où<br />
devrait se marquer l’impraticable Science de la science » (pp.46-47).<br />
C’est dans cet espace variationnel que s’engouffrent les idéologies qui sont des<br />
variations sur un même thème. Une multiplicité illusoire qui peut être opposée à<br />
la multiplicité articulée et réelle des sciences (Badiou utilise la métaphore<br />
mathématique discret/continu pour illuster et opposer ces deux sortes de<br />
plur<strong>al</strong>ités). Et ce manège idéologique nous faire tourner en rond : « on ne pose<br />
que les questions dont la réponse est la condition déjà donnée de la question<br />
elle-même » (p.48), manège dont la rotation est comparée à celle du marxisme :<br />
«Marx dit – à peu près – l’homme ne se pose que les problèmes qu’il peut<br />
résoudre » (p.49).<br />
299 Pour Althusser (1974, p.64) : « La distinction entre le scientifique et l’idéologique est<br />
intérieure à la philosophie. Elle est le résultat de l’intervention philosophique. La philosophie fait<br />
un avec son résultat, qui constitue l’effet-philosophie. »<br />
AL-MUKHATABAT Numéro 03 Année 01/2012 لىولأا ةن سلا 30 ددعلا تابطانا<br />
283<br />
ISSN: 1737-6432