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DOSSIER
Cosmologie
THÉORIES
L’hypothèse de l’éternel retour
Contraction
Expansion
Dans les cosmologies cycliques, dites aussi à
rebond, l’Univers se dilate et se contracte en
une perpétuelle alternance, en passant à chaque
fois par un goulet d’étranglement.
BRUNO BOURGEOIS
C
’est en 1922, il y a tout
juste un siècle, que
l’hypothèse d’une cosmologie
cyclique a été pour la première
fois formalisée. Reprenant les
équations de la relativité
générale d’Albert Einstein, le
Russe Alexandre Friedmann
découvre alors des solutions
que le physicien n’avait pas
envisagées. Celle d’un univers
en expansion, en particulier.
Mais Alexandre Friedmann
réalise aussi (en partant du
principe que l’Univers est
fermé et en fonction de la
quantité de matière qu’il
renferme) que cette
dynamique pourrait au bout
d’un certain temps s’arrêter. Et
même s’inverser, sous l’effet
de l’attraction gravitationnelle,
jusqu’à revenir à l’état
d’origine… « Un peu comme
une balle propulsée vers le
ciel, explique Yann Mambrini
du Laboratoire de physique
des 2 infinis Irène-Joliot-
Curie (IJCLab) à l’université
Paris-Saclay. Selon l’énergie
de départ, elle peut soit être
satellisée, soit atteindre
un quasi-équilibre, soit encore
retomber. » La possibilité
d’une suite incessante de
phases d’expansion et de
contraction de l’Univers est
explorée en 1931 par
l’Américain Richard Tolman.
« Il est le premier à imaginer
une infinité de cycles, souligne
Yann Mambrini, telle une
balle qui rebondirait sans
fin. » Une solution que le
chanoine et astronome belge
Georges Lemaître qualifie en
1933 d’univers-phénix, à
l’instar de l’oiseau mythique
renaissant périodiquement de
ses cendres. Mais cette
perspective génère un tas
d’interrogations, au regard du
second principe de la
thermodynamique
notamment, selon lequel
l’entropie (ou la quantité de
désordre) ne peut
qu’augmenter. Car pour
respecter cette loi
fondamentale, observe
Richard Tolman, le rayon de
l’Univers et la durée de chaque
cycle devraient croître eux
aussi au cours du temps. Telle
une balle, pour poursuivre
notre analogie, qui rebondirait
toujours de plus en plus
haut… mais en partant de
quelle situation et jusqu’à
quand ? « Depuis les années
1930 et aujourd’hui encore,
l’entropie pose des difficultés
majeures aux modèles
d’univers cycliques », souligne
Killian Martineau, du
Laboratoire de physique
subatomique et de cosmologie
(LPSC) à l’université de
Grenoble. Sans compter les
problèmes liés à la description
physique de chaque rebond…
Ou au fait, comme on le sait
depuis 1998, que l’expansion
de l’Univers s’accélère sous
l’effet d’une mystérieuse
énergie noire. Pour les
résoudre, le cosmologiste
américain Paul Steinhardt
développe une panoplie de
modèles, dont la dernière
version a été publiée en
janvier. « Elle nécessite que
l’accélération actuelle de
l’expansion provienne d’un
champ d’énergie dynamique,
évoluant dans le temps, qui se
transformerait ensuite pour
enclencher une contraction.
Des hypothèses qui, mises
bout à bout, restent encore très
spéculatives », estime
Killian Martineau.
N° 909 - Novembre 2022 - Sciences et Avenir - La Recherche - 45