Le conte de fées littéraire féminin de la fin du XVIIe siècle - Archipel
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d'écrire 67 », l'abbé <strong>de</strong> Pure, quant à lui, note au sujet <strong>de</strong> l'art d'écrire, qu' « [... ] il faut le<br />
<strong>la</strong>isser aux hommes, sans leur porter ennui, et sans le vouloir imiter 68 ». Malgré les préjugés<br />
persistants en défaveur <strong>de</strong> l'écriture <strong>féminin</strong>e, les <strong>de</strong>ux œuvres <strong>de</strong> Ma<strong>de</strong>moiselle <strong>de</strong> Scudéry,<br />
<strong>Le</strong> Grand Cyrus 69 et <strong>la</strong> Clélie 70 , sont publiées au milieu <strong>du</strong> <strong>siècle</strong>. Ainsi, même si J'écriture<br />
reste, pour <strong>la</strong> majorité <strong>de</strong>s femmes, une pratique d'amateur et <strong>la</strong> publ ication un acte le plus<br />
souvent masqué, notamment par le recours à l'anonymat -l'écriture professionnelle, fonction<br />
exclusivement masculine, déroge au principe <strong>de</strong> mo<strong>de</strong>stie exigé <strong>de</strong> <strong>la</strong> part <strong>de</strong>s femmes, en<br />
particulier <strong>de</strong>s aristocrates -, les Précieuses ont ouvert <strong>la</strong> voie à <strong>la</strong> légitimation <strong>de</strong> l'écriture<br />
<strong>féminin</strong>e.<br />
Dans le domaine <strong>de</strong>s « sciences <strong>du</strong> <strong>la</strong>ngage », les Précieuses entreprennent <strong>de</strong> faire<br />
adopter une réforme <strong>de</strong> l'orthographe - que leur ignorance <strong>de</strong>s <strong>la</strong>ngues savantes rendait trop<br />
difficile - et <strong>la</strong> création d'un lexique adapté à leur pudicité où trivialité et expressions trop<br />
communes sont bannies. <strong>Le</strong>ur implication dans <strong>la</strong> critique <strong>littéraire</strong> et <strong>la</strong> consécration <strong>de</strong>s<br />
écrivains, qui s'appuie essentiellement sur un goüt mondain?l, suscitera <strong>la</strong> satire <strong>de</strong> leurs<br />
<strong>conte</strong>mporains n pour lesquels il est impossible <strong>de</strong> juger <strong>de</strong>s œuvres <strong>littéraire</strong>s sans une<br />
connaissance savante <strong>de</strong> <strong>la</strong> rhétorique c<strong>la</strong>ssique.<br />
Lieux privilégiés <strong>du</strong> phénomène précieux, les salons dont <strong>la</strong> fréquentation requiert<br />
peu d'instruction mais exige <strong>de</strong> connaître et d'appliquer un co<strong>de</strong> <strong>de</strong> comportement social,<br />
représentent un moyen d'accès privilégié à <strong>la</strong> vie intellectuelle et <strong>littéraire</strong> 73 et, <strong>de</strong> ce fail, un<br />
lieu <strong>de</strong> formation permanente pour <strong>de</strong>s femmes encore peu instruites qui y acquièrent une<br />
67 Somaize, Dictionnaire <strong>de</strong>s Précieuses, op., cit., t. l, p. 22.<br />
68 Abbé <strong>de</strong> Pure, La Prétieuse, op. cit., t. 1, p. 25.<br />
69 Ma<strong>de</strong>moiselle <strong>de</strong> Scudéry, Artamène ou <strong>Le</strong> Grand Cyrus [1649-1653], reprod. en fac-sim. <strong>de</strong><br />
l'édition <strong>de</strong> Paris <strong>de</strong> 1656, Genève, S<strong>la</strong>tkine, 1972, 10 vol.<br />
70 Ma<strong>de</strong>moiselle <strong>de</strong> Scudéry, CLéLie, histoire romaine [1654-1660], réimpression <strong>de</strong> l'édition <strong>de</strong> Paris<br />
<strong>de</strong> 1660, Genève, S<strong>la</strong>tkine, 1973, 10 vol.<br />
71 Sur <strong>la</strong> critique précieuse <strong>de</strong>s œuvres <strong>littéraire</strong>s, voir Jean-Pierre Dens, « <strong>Le</strong> Chevalier <strong>de</strong> Méré et <strong>la</strong><br />
critique mondaine », DSS, nO 101, 1973, p. 41-50 et L 'honnête homme et <strong>la</strong> critique <strong>du</strong> goût:<br />
esthétique et société au XVrf <strong>siècle</strong>, <strong>Le</strong>xington, French Forum Publishers, 1981, p. 59-110.<br />
72 L'on pense bien sûr à <strong>la</strong> satire <strong>de</strong> Molière dans ces Précieuses ridicules publiées en 1660. Pour une<br />
étu<strong>de</strong> sur le comique <strong>de</strong>s Précieuses ridicules voir O<strong>de</strong>tte <strong>de</strong> Mourgues, « Molière et le comique <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />
fréciosité », Mé<strong>la</strong>nges offerts à Georges Couton, Lyon, Presses universitaires <strong>de</strong> Lyon, p. 403-412.<br />
J Somaize note que les Précieuses « [... ] sont visitées <strong>de</strong> beaucoup d'autheurs, avec qui elles ont un<br />
perpétuel commerce d'esprit ». Somaize, Dictionnaire <strong>de</strong>s Précieuses, op. cil., t. 1, p. 9.<br />
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