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Le conte de fées littéraire féminin de la fin du XVIIe siècle - Archipel

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vertueux 277 . Ainsi, et comme le souligne Anne Defrance: « l'animalisation spiritualise et<br />

illustre l'abandon <strong>de</strong>s pulsions charnelles 278 ». <strong>Le</strong> corps et les désirs qui lui sont associés<br />

représentant une menace pour <strong>la</strong> veltu <strong>de</strong>s héroïnes <strong>de</strong> <strong>conte</strong>s <strong>de</strong> <strong>fées</strong>, le choix d'un amant<br />

non-humain représente <strong>la</strong> possibilité d'aimer chastement et <strong>de</strong> s'entendre parler d'amour par<br />

<strong>de</strong>s prétendants convertis à une certaine délicatesse <strong>de</strong>s sentiments héritée <strong>du</strong> co<strong>de</strong> amoureux<br />

précieux. À l'exemple <strong>du</strong> Prince Rosier qui obtient par son discours ga<strong>la</strong>nt les faveurs <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

Princesse Florin<strong>de</strong> dans le <strong>conte</strong> <strong>de</strong> Ma<strong>de</strong>moiselle Bernard, le <strong>la</strong>ngage <strong>de</strong>vient l'instrument<br />

privilégié <strong>de</strong> <strong>la</strong> conquête amoureuse:<br />

Insensiblement, elle [Florin<strong>de</strong>] s'accoutuma à lui donner dans son esprit une figure<br />

humaine, et même une figure aimable; peu à peu elle souffrit qu'il lui parlât<br />

d'amour; il lui semb<strong>la</strong>it que les discours d'un arbre ne pouvaient être dangereux 279 .<br />

<strong>Le</strong>s <strong>conte</strong>s <strong>de</strong> <strong>fées</strong> <strong>féminin</strong>s <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>fin</strong> <strong>du</strong> XVII" <strong>siècle</strong>, inspirés <strong>de</strong>s romans héroïques<br />

ou pastoraux, sont, comme le souligne Raymon<strong>de</strong> Robelt: « fortement influencés par les<br />

modèles précieux et par <strong>la</strong> casuistique amoureuse d'une ga<strong>la</strong>nterie stéréotypée [... f80 ». <strong>Le</strong>s<br />

critiques <strong>conte</strong>mporaines déplorent fréquemment un discours qui, <strong>de</strong>s décennies après<br />

l'engouement <strong>du</strong> courant précieux, relève <strong>du</strong> cliché ga<strong>la</strong>nt dans les textes <strong>de</strong> nos <strong>conte</strong>uses.<br />

Teresa Di Scanno note ainsi l'emploi récurrent, dans les <strong>conte</strong>s <strong>de</strong> Madame <strong>de</strong> Murat, <strong>de</strong><br />

maximes banales telle celle <strong>du</strong> <strong>conte</strong> « Anguillette », « ce qui touche le cœur est toujours le<br />

plus sensible» ou d'un jargon ga<strong>la</strong>nt élogieux stéréotypé dans « <strong>Le</strong> Prince <strong>de</strong>s feuilles» :<br />

Est-il possible [... ] qu'une déesse comme vous n'ait pas <strong>de</strong>s temples par tout<br />

l'univers? Par quels charmes, par quels prodiges, êtes-vous encore inconnue aux<br />

mortels 281 ?<br />

De même Mary Elizabeth Storer mentionne l'usage courant, dans les <strong>conte</strong>s <strong>de</strong> Ma<strong>de</strong>moiselle<br />

<strong>de</strong> La Force, d'expressions « usées », comme « le trône <strong>de</strong> l'Amour », expression figurant les<br />

277 Cupidon, dont l'ai<strong>de</strong> a été sollicité par Constancio, lui répond: «Tu brûles d'une f<strong>la</strong>mme trop pure<br />

pour que je te refuse mon secours [... J il faut que j'éprouve ta passion avant que <strong>de</strong> te découvrir où elle<br />

[ConstanciaJ est [... J. Jette-toi dans ce feu [... J et souviens-toi que si tu n'aimes pas uniquement et<br />

fidèlement, tu es per<strong>du</strong> ». Ibid., p. 880-881.<br />

278 Anne Defrance, <strong>Le</strong>s <strong>conte</strong>s et les nouvelles <strong>de</strong> Mme d'Aulnoy, op. Cil., p. 147.<br />

279 Ma<strong>de</strong>moiselle Bernard, « <strong>Le</strong> Prince Rosier », Contes, op. cil" p. 281-282.<br />

280 Raymon<strong>de</strong> Robert, <strong>Le</strong> <strong>conte</strong> <strong>de</strong><strong>fées</strong> lilléraire, op. Cil., p. 169.<br />

281 Teresa Di Scanno, <strong>Le</strong>s conles <strong>de</strong> <strong>fées</strong> à l'époque c<strong>la</strong>ssique, op. cil., p. 156-157. <strong>Le</strong>s citations sont<br />

extraites <strong>de</strong>s <strong>conte</strong>s « Anguillette» et « <strong>Le</strong> Prince <strong>de</strong>s feuilles» <strong>de</strong> Madame <strong>de</strong> Murat, Contes, op. cil.,<br />

p. 87 et p. 164.<br />

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