Le conte de fées littéraire féminin de la fin du XVIIe siècle - Archipel
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un public salonnier. Usage <strong>de</strong> <strong>la</strong> versification, <strong>de</strong> maximes, interférences avec d'autres genres<br />
<strong>littéraire</strong>s à <strong>la</strong> mo<strong>de</strong> - comme <strong>la</strong> nouvelle ga<strong>la</strong>nte ou <strong>la</strong> pastorale - témoignent d'une<br />
esthétique <strong>littéraire</strong> salonnière plus que d'une retranscription <strong>du</strong> <strong>la</strong>ngage popu<strong>la</strong>ire dont <strong>la</strong><br />
grossièreté est par ailleurs condamnée par Ma<strong>de</strong>moiselle Lhéritier dans sa « <strong>Le</strong>ttre à Mme<br />
D. G*** » :<br />
Je croi [... ] que ces <strong>conte</strong>s se sont remplis d'impuretés en passant dans <strong>la</strong> bouche <strong>du</strong><br />
petit peuple; <strong>de</strong> même qu'une eau pure se charge toujours d'or<strong>du</strong>res en passant par<br />
un canal sale. Si les gens <strong>du</strong> peuple sont simples, ils sont grossiers aussi: ils ne<br />
savent pas ce que c'est que <strong>la</strong> bienséance [... ]. Si le peuple, ou les troubadours,<br />
s'étaient exprimés comme nous, leurs <strong>conte</strong>s n'en auraient que mieux valu l47 .<br />
<strong>Le</strong> <strong>conte</strong> <strong>littéraire</strong> dérive directement, nous l'avons vu, d'une tradition popu<strong>la</strong>ire dont<br />
il gar<strong>de</strong> <strong>de</strong>s marques d'oralité. Mais contrairement à cette tradition orale anonyme, il est le<br />
fruit d'une véritable création et peut <strong>de</strong> ce fait être rattaché à un auteur, une époque ou une<br />
esthétique <strong>littéraire</strong>. Alors que le <strong>conte</strong> <strong>littéraire</strong> diffère <strong>du</strong> <strong>conte</strong> popu<strong>la</strong>ire par un <strong>de</strong>gré<br />
d'oralité, il en est totalement coupé par son <strong>conte</strong>xte sociologique et ses conditions <strong>de</strong><br />
pro<strong>du</strong>ction. Madame <strong>de</strong> Murat, dans son « Avertissement» aux Histoires sublimes et<br />
allégoriques <strong>de</strong> 1699, est <strong>la</strong> seule, parmi nos <strong>conte</strong>uses <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>fin</strong> <strong>du</strong> XV ue <strong>siècle</strong>, à révéler <strong>de</strong>s<br />
sources <strong>littéraire</strong>s autres que <strong>de</strong>s sources popu<strong>la</strong>ires orales, notant qu'elle et ses<br />
<strong>conte</strong>mporaines s'inspirent <strong>la</strong>rgement <strong>de</strong>s Facétieuses nuits <strong>de</strong> Straparo<strong>la</strong> : « <strong>Le</strong>s Dames qui<br />
ont écrit jusqu'ici en ce genre, ont puisé dans <strong>la</strong> même source au moins pour <strong>la</strong> plus gran<strong>de</strong><br />
partie l48 ». La prétention au folklore qui ponctue les <strong>conte</strong>s et leurs commentaires à <strong>la</strong> <strong>fin</strong> <strong>du</strong><br />
xvW <strong>siècle</strong> paraît liée à l'avènement d'une littérature nouvelle, <strong>féminin</strong>e, qui, loin <strong>de</strong>s<br />
modèles antiques réservés aux écrivains masculins, s'inspire d'une culture popu<strong>la</strong>ire orale.<br />
1.2.3 L'implication <strong>du</strong> <strong>conte</strong> et <strong>de</strong> l'écriture <strong>féminin</strong>e dans <strong>la</strong> Querelle<br />
Alors que, comme nous l'avons vu, le préjugé persistant <strong>de</strong> <strong>la</strong> pu<strong>de</strong>ur <strong>féminin</strong>e<br />
rendait inconvenabJe <strong>la</strong> publication <strong>de</strong> ses œuvres <strong>du</strong>rant <strong>la</strong> première moitié <strong>du</strong> <strong>XVIIe</strong> <strong>siècle</strong>,<br />
147 Ma<strong>de</strong>moiselle Lhéritier, « <strong>Le</strong>ttre à Mme D. G*** », Conles, op. cif., p. 39.<br />
148 Madame <strong>de</strong> ML1rat, « Avertissement» <strong>de</strong>s Histoires sublimes el allégoriques, op. Cil., p. 200.<br />
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