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qui s’en prenaient ainsi à Lotte. Elle <strong>au</strong>rait voulu pousser Gabriella dehors pour la voir connaître le<br />

même sort. Ce n’était pas juste ! Personne ne devrait souffrir <strong>au</strong>tant, en particulier quelqu’un qui s’était<br />

montré <strong>au</strong>ssi attentionné et loyal durant toute sa vie.<br />

Les gens trop éloignés pour participer à <strong>ce</strong>tte immonde distraction se cherchèrent rapidement un <strong>au</strong>tre<br />

amusement. Quelques têtes d’hommes et de femmes se penchèrent à l’intérieur du carrosse. L’un d’eux vit<br />

l’éventail de Gabriella tombé <strong>au</strong> sol et s’en empara. Deux <strong>au</strong>tres regardèrent droit en direction d’Ulrika<br />

et elle se dit un instant que le sortilège de la comtesse n’avait pas fonctionné, puis ils disparurent pour<br />

grimper sur le toit.<br />

—Regardez-moi toutes <strong>ce</strong>s malles ! lança l’un d’eux.<br />

—Prenez les chev<strong>au</strong>x ! cria un <strong>au</strong>tre.<br />

Gabriella serra les dents sous les secousses infligées <strong>au</strong> carrosse et alors que ses malles et valises<br />

étaient jetées pour s’écraser sur la ch<strong>au</strong>ssée.<br />

—Quelle bande d’anim<strong>au</strong>x ! souffla-t-elle.<br />

Leur parvint alors un cri qui fit tressaillir Ulrika à nouve<strong>au</strong>.<br />

—Démontez <strong>ce</strong> carrosse ! récupérez le bois pour le feu !<br />

Elle leva les yeux vers Gabriella, dont elle devinait tout juste la présen<strong>ce</strong>, lorsque la foule gronda son<br />

approbation. Elle comprit qu’elle était inquiète elle <strong>au</strong>ssi. La comtesse se tourna vers la portière de<br />

droite qui était restée fermée, puis elle tendit la main pour entrouvrir les lattes et regarder <strong>au</strong>-dehors.<br />

—Nous sommes contre la devanture d’une sorte de boutique, chuchota-t-elle en s’accrochant à la<br />

banquette à c<strong>au</strong>se des secousses. Nous allons sortir et nous y réfugier. Fais attention à ne bousculer<br />

personne.<br />

—Très bien, maîtresse.<br />

—Et garde ta tête couverte. Cette illusion n’offre <strong>au</strong>cune protection contre le soleil.<br />

Les doigts diaphanes de Gabriella firent tourner le loquet dou<strong>ce</strong>ment, s’attendant à une quelconque<br />

réaction. Il n’y en eut <strong>au</strong>cune, à l’ex<strong>ce</strong>ption des cris in<strong>ce</strong>ssants et des secousses. La porte s’ouvrit toute<br />

seule sous l’une d’elles, la comtesse s<strong>au</strong>ta <strong>au</strong> sol, Ulrika tira sa cape sur sa tête et la suivit, mais une<br />

secousse plus forte que les <strong>au</strong>tres la jeta violemment contre le mur à colombages. Gabriella la releva<br />

d’une main et elles restèrent toutes deux immobiles, plaquées contre la bâtisse. Des émeutiers se<br />

trouvaient sur leur g<strong>au</strong>che et sur leur droite, ils tentaient de faire basculer le carrosse. Ils étaient si<br />

proches qu’Ulrika <strong>au</strong>rait pu les toucher en tendant le bras.<br />

—La porte est juste sur la droite, lui souffla Gabriella à l’oreille. Nous essayons dès que c’est dégagé.<br />

Ulrika hocha la tête. Elle espérait que <strong>ce</strong>la n’attendrait pas trop, le soleil tentait déjà de s’insinuer à<br />

travers les fibres de ses vêtements et elle avait l’impression que des milliers de fourmis lui couraient<br />

dessus. Elle regarda vers la droite. Deux marches de bois montaient vers une porte ouverte surmontée<br />

d’une enseigne représentant une pe<strong>au</strong> de vache étendue. Une tannerie. Quelques hommes portant des<br />

tabliers et des chemises <strong>au</strong>x manches retroussées se tenaient sur le pas, surveillant les événements et<br />

montrant ostensiblement leurs gourdins. Ils étaient prêts à défendre leur commer<strong>ce</strong> si la popula<strong>ce</strong> avait la<br />

m<strong>au</strong>vaise idée de se s’en prendre à eux.<br />

Puis, répondant à un nouve<strong>au</strong> grondement de la foule, le carrosse fut littéralement soulevé et alla<br />

s’écraser sur le flanc. Les pillards s’élancèrent en hurlant de joie et en rigolant et ils entreprirent de le<br />

détruire à coups de pieds, comme des chasseurs primitifs s’acharnant <strong>au</strong>tour de leur proie.<br />

—Allez ! souffla Gabriella, puis elle conduisit Ulrika vers la porte, en se glissant discrètement derrière<br />

les émeutiers les plus proches.<br />

Il y avait tout juste assez d’espa<strong>ce</strong> entre les trois ouvriers qui se tenaient à la porte pour qu’une<br />

personne <strong>au</strong>ssi svelte qu’elle puisse passer, mais avec leurs toilettes à crinolines, leurs silhouettes

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