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aiser de sang. Tu ne peux pas avoir confiance en un humain qui sait qui tu es et qui n’est pas lié à toi, et
d’autant moins s’il s’agit d’un chasseur de sorcières, comme tu l’as appris à tes dépens aujourd’hui.
—Je suis désolée, maîtresse, souffla Ulrika. Cela ne se reproduira plus.
Gabriella serra ses mains dans les siennes.
—C’est une leçon bien durement apprise, je le sais, mais elle devait l’être. Autrement, tu n’éprouveras
rien d’autre que de la peine et de la douleur. Et je sais de quoi je parle.
Elle attira la tête d’Ulrika contre elle.
—Maintenant, repose-toi. Nous n’avons rien d’autre à faire qu’attendre que vienne la nuit. Ensuite,
nous traverserons le fleuve et irons parler à Hermione.
Ulrika ferma les yeux, mais les cris de la foule et les craquements des flammes du bûcher
l’empêchèrent de trouver facilement le sommeil.
Après cette journée de démente frénésie, le coucher du soleil fit tomber sur Nuln un drap de silence irréel
et apeuré. Les deux femmes se glissèrent dans les rues froides de l’Industrielplatz, sombres et désertées,
et dans lesquelles on pouvait toujours apercevoir les résultats des excès de la journée. Même les forges,
qui d’habitude grondaient jour et nuit, avaient été laissées à refroidir et silencieuses. Elles aperçurent des
fenêtres brisées un peu partout, des manches d’outils cassés gisaient dans la boue et des signes
représentant le marteau de Sigmar avaient été grossièrement tracés sur les façades des ateliers et des
commerces en guise de protection contre les morts-vivants.
Les chasseurs de sorcières n’avaient pas abandonné leur garde aux extrémités du Grand Pont, arrêtant
chaque chariot ou calèche, ainsi que toute femme qui voulait traverser. Elles n’insistèrent donc pas et
repartirent en arrière sur une bonne demi-lieue pour tenter leur chance sur le pont du Donjon de Fer, mais
lui aussi était surveillé.
—Ils doivent sans doute avoir notre description, dit Gabriella en reculant dans l’ombre d’une fonderie
afin de réfléchir. Et ils doivent aussi porter de l’argent, de l’ail ou des racines magiques pour nous mettre
à l’épreuve. Je n’ai pas trop envie de prendre le risque. Ils seront probablement bien moins polis qu’il ne
l’étaient la première fois chez Hermione.
—Pouvons-nous prendre un bateau ? demanda Ulrika. Il doit bien y avoir quelques pêcheurs qui
accepteraient de nous faire passer sur l’autre rive.
Gabriella grimaça et frissonna.
—Un bateau ouvert est trop dangereux. Les vampires ne sont très à l’aise avec l’eau vive. Non. Je
pense avoir une meilleure idée.
Elle se dirigea vers le sud et retourna en direction du Faulestadt, vers ce labyrinthe de rues crasseuses
et de bâtisses miteuses dont elles s’étaient enfuies le matin même.
—Une idée toute Lahmiane, ajouta-t-elle.
—On est en virée, ma bonne dame ? demanda un gars en tenue d’imprimeur à Ulrika. Fatiguée du p’tit vin
de l’Altestadt et vous cherchez kek’chose de plus fort dans le Faulestadt ?
—C’est la nouvelle mode au nord du fleuve ? insista son camarade en indiquant la coupe d’Ulrika, un
pêcheur d’après sa tenue, mais également d’après l’odeur qu’il dégageait. On a plutôt tendance à les
porter longs par ici, ajouta-t-il en montrant l’arrière de son genou.
—Cette noble dame attend la venue d’un gentilhomme du guet, répondit Gabriella d’une voix en accord
avec son déguisement de servante. Il lui a demandé de venir à cet établissement pour identifier l’homme
qui lui a dérobé un collier et sa perruque.
Les hommes ouvrirent de grands yeux et se rappelèrent soudain qu’ils avaient mieux à faire.