Maurice Maignen - Apôtre du monde ouvrier - par Richard Corbon s.v.
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Dans une circulaire <strong>du</strong> 16 octobre 1861, il invite les Préfets à veiller à régulariser la situation<br />
des associations de bienfaisance non encore autorisées. C’est <strong>par</strong> ce biais qu’il va atteindre la<br />
Société. Le grief principal est la centralisation de la Société, et notamment le rôle <strong>du</strong> Conseil<br />
général, accusé de gouverner les conférences locales pour faire de la Société une association<br />
occulte. Le Conseil général est dissous le 22 décembre. 131<br />
C’est son rôle de coordonnateur d’œuvres catholiques à caractère social que le gouvernement<br />
cherche à amoindrir en frappant le Conseil général, dans la mesure où la plu<strong>par</strong>t de<br />
ses membres sont, non seulement à l’origine des initiatives prises <strong>par</strong> ces institutions mais<br />
qu’ils sont, en outre, des laïques, susceptibles de constituer au sein de l’Etat, avec des congrégations<br />
amies comme les Lazaristes, les Frères des Ecoles Chrétiennes ou les Frères de Saint-<br />
Vincent-de-Paul, un contre-pouvoir catholique échappant à la tutelle concordataire. 132<br />
Dans un tel contexte, fort des liens qui l’unissent à la Société, la Communauté de M.<br />
LePrevost ne pouvait manquer d’être, lui aussi, dans la ligne de mire gouvernementale. Le<br />
fondateur sera soupçonné d’accointances avec le <strong>par</strong>ti légitimiste. A un Frère de province, il<br />
écrit le 16 novembre: "..Vous savez les tribulations de la Société; on gémit en voyant une institution,<br />
si inoffensive et si noble dans ses actes, méconnue et tristement entravée...nous<br />
avons, de notre côté, été l’objet de surveillances et inquisitions jusqu’ici inusitées pour nous;<br />
l’orphelinat de Vaugirard est maintenant soumis aux inspections de l’Université, etc..." Le<br />
contrôle n’ira guère plus loin, l’inspecteur général ne recueillant que des renseignements favorables<br />
sur la charité, le zèle et le désintéressement de l’abbé LePrevost.<br />
Mais c'est un autre genre de difficulté qui allait surgir et affecter les relations entre la<br />
Société et la Congrégation des Frères.<br />
Le 15 janvier 1859, LePrevost écrivait à P.Decaux: "Les Frères feraient volontiers un<br />
quatrième vœu: celui de ne rien refuser à leurs bons amis et Frères des Conférences, hors le<br />
cas de réelle impossibilité..." et quant à lui, M. Decaux ne tarissait pas d’éloges sur les Frères,<br />
"bons, héroïquement sacrifiés,...je ne sache pas qu’il soit possible de pousser plus loin l’esprit<br />
d’immolation" (à LePrevost.21.9.1864).<br />
Mais ces amabilités n’empêchaient pas les malenten<strong>du</strong>s.<br />
Sur son journal, le président de l’Œuvre <strong>du</strong> patronage, P. Decaux, note, à la date <strong>du</strong> 3<br />
mars 1861: "Chez M. Baudon, conférence avec MM. Baudon, Dauchez, Lantiez, Myionnet et<br />
Paillé, pour les affaires de Notre-Dame de Grâce et Nazareth. Seize ans après leur fondation,<br />
un grave malenten<strong>du</strong> se dissipe, qui aurait pu freiner leur développement et briser des liens<br />
qu’ils entendaient maintenir..."<br />
Les Frères voyaient s’achever un douloureux conflit dont il faut <strong>par</strong>courir les phases<br />
principales.<br />
On a vu comment A. Baudon était désireux de restructurer l’ensemble de la Société et à<br />
cette fin, dès 1860, il s’intéresse de près, -il est expert financier et sans doute prévoit-il aussi<br />
les interventions gouvernementales-, aux biens que possède la Société. Avec les Frères, se<br />
pose alors la question: à qui ap<strong>par</strong>tiennent les œuvres de Nazareth et de Grenelle, car il estime<br />
que la Société a sa quote-<strong>par</strong>t de droits sur ces deux maisons. M. LePrevost lui rappelle<br />
qu’elles sont, dans leur majeure <strong>par</strong>tie, le fruit <strong>du</strong> travail des Frères et que la Société n’a pas<br />
eu, à affronter, comme eux, les risques de l’entreprise.<br />
131 En janvier 1870, le Conseil général et les conseils centraux sont rétablis, conformément à la loi sur le droit de réunion. A.<br />
Foucault, la Société de Saint-Vincent-de-Paul. Histoire de cent ans, p.208.<br />
132 Jacques-Olivier Boudon, Paris, capitale religieuse sous l’Empire, 2001, p.160.<br />
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