Maurice Maignen - Apôtre du monde ouvrier - par Richard Corbon s.v.
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acontée avec l’éloquence <strong>du</strong> cœur, qui ne trompe pas les enfants. <strong>Maignen</strong>, qui s’y connaissait<br />
dans l’art <strong>du</strong> conteur, était lui aussi sous le charme, comme aux premiers jours. Et une<br />
magnifique loterie acheva de mettre tout le <strong>monde</strong> au comble de l’enthousiasme.<br />
Ainsi, l’humble patronage prit son envol...le curé vint régulièrement donner un peu<br />
d’instruction religieuse, nullement imbu de ses prérogatives <strong>par</strong>oissiales, mais en missionnaire,<br />
M. LePrevost s’imposa de s’y rendre chaque dimanche, pendant plusieurs années jusqu’en<br />
1851, pour seconder le F.<strong>Maignen</strong>, directeur débutant, pour la séance des avis. Aide à<br />
l’initiation peut-être, mais en réalité <strong>par</strong> amitié encore trop captative, comme le reconnaît,<br />
avec franchise, "le jeune frère": "il s’était chargé de cette tâche, plus pour le contenter que <strong>par</strong><br />
la persuasion que sa présence fût indispensable".<br />
Lorsqu’il se penche sur ces petites œuvres de Grenelle, des pages uniques comme il ne<br />
s’en écrira plus dans l’histoire de l’Institut, M. <strong>Maignen</strong> observe combien le zèle des trois<br />
fondateurs, premiers missionnaires pour un apostolat des plus ingrats, était soutenu <strong>par</strong><br />
l’attachement que leur témoignaient leurs enfants. "L’esprit de famille, si difficile à obtenir<br />
dans les œuvres, surtout à leur début, avait pris naissance dès le premier jour en ce petit patronage.<br />
L’école, le catéchisme et la première communion avaient établi entre ces enfants un<br />
attachement bien fraternel" dont bénéficièrent les Frères. <strong>Maignen</strong> relève ici l’effet de contagion<br />
pro<strong>du</strong>it <strong>par</strong> l’amitié qui unit seize gamins de patronage..."Les frères possédèrent bientôt,<br />
<strong>par</strong> le Patronage, leur confiance entière. Ils étaient désirés, atten<strong>du</strong>s chaque dimanche comme<br />
des amis sans lesquels on ne peut s’amuser". Quand approchait l’heure où M. LePrevost accompagné<br />
des deux autres frères, devait arriver, ces bons enfants, <strong>du</strong> pas de la porte <strong>du</strong> local<br />
<strong>du</strong> Patronage, les guettaient, et, <strong>du</strong> plus loin qu’ils les apercevaient, se précipitaient à leur<br />
rencontre et les ramenaient à leur maison comme en triomphe. C’étaient des poignées de main<br />
à n’en pas finir et des expansions de joie aussi vives qu’elles étaient naturelles et sincères.<br />
Souvenirs d’autant plus impérissables que cet accueil contrastait avec les témoignages de reconnaissance<br />
de la <strong>par</strong>t de leurs enfants de Paris, "pourtant affectueux", note M.<strong>Maignen</strong>.<br />
Pour tenter une explication, il donne les chiffres des budgets: rue <strong>du</strong> Regard, 10000<br />
francs <strong>par</strong> an, à Grenelle, 400! Certes, le personnel, les charges et le mouvement de<br />
l’ensemble des œuvres n’étaient pas com<strong>par</strong>ables. Mais il ne pourra s’empêcher, vingt-cinq<br />
ans après, de "reconnaître déjà que l’action sur les âmes ne dépend pas essentiellement de<br />
l’éten<strong>du</strong>e des moyens matériels, et que ceux-ci resteraient toujours stériles, s’ils étaient complètement<br />
dépourvus d’éléments religieux et moraux..."<br />
Mais il nous faut revenir sur le soulèvement <strong>du</strong> peuple de Paris en 1848.<br />
1848 : la communauté des Frères à l’épreuve de la Révolution<br />
C’est <strong>par</strong> une banale campagne de banquets, où se donnèrent libre cours des revendications<br />
de réforme électorale, qu'a commencée la Révolution de 1848. Exploitée <strong>par</strong> quelques<br />
agitateurs <strong>par</strong>isiens, la révolte populaire donnera le coup de grâce au régime d’une monarchie<br />
constitutionnelle dont personne ne veut plus.<br />
Mais, d’ordinaire, une révolution vient de plus loin et de plus profond, lorsque, <strong>par</strong><br />
exemple, coïncident crise économique et crise politique, ce qui était le cas en 1848. Les deux<br />
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