25.06.2013 Views

Maurice Maignen - Apôtre du monde ouvrier - par Richard Corbon s.v.

Maurice Maignen - Apôtre du monde ouvrier - par Richard Corbon s.v.

Maurice Maignen - Apôtre du monde ouvrier - par Richard Corbon s.v.

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

organiser le travail. La même préoccupation revient sous sa plume lorsqu’il répond, dans une<br />

lettre déjà citée, à ce correspondant qui l’interpelle sur sa foi chrétienne:<br />

"Ce reproche que tu adresses au christianisme d’avoir été impuissant à organiser la société<br />

sur des bases harmoniques est-il réellement fondé?...le paganisme est <strong>par</strong>tout aujourd’hui<br />

dans la société et je ne sais pas si ta doctrine n’est pas un pro<strong>du</strong>it de ces appétits<br />

matériels qui dévoraient le paganisme antique. Ce bonheur dans la chair et le vin que le christianisme<br />

n’a pas encore terrassé. Donc, mon cher ami, le christianisme peut dire comme le<br />

fouriérisme: ne me condamnez qu’après m’avoir éprouvé. Le christianisme est à organiser<br />

socialement. Il a organisé le <strong>monde</strong> moral, il lui faut organiser le <strong>monde</strong> des intérêts; il a pour<br />

cela de grands éléments et tu les apprécies comme moi...."<br />

Il aimera ainsi donner forme à ce qui doit prendre vie ou corps, à redonner vie à ce qui<br />

est désorganisé, divisé, sé<strong>par</strong>é, en vue de restructurer l’ensemble. De plus, il a l’esprit pratique,<br />

le souci des principes et <strong>du</strong> détail. Comme jeune confrère, sa première tâche qu’il se voit<br />

confier est d’organiser une loterie. Plus tard, son Manuel de patronage et son Cercle seront<br />

des modèles d’organisation détaillée, tel un corps dont les organes sont hiérarchisés dans leur<br />

fonction. De même, sa conception de la société, de la famille, et des œuvres. Quand il pense<br />

organisation sociale, il ne peut que la penser intégrale, faite de tous les éléments nécessaires à<br />

la fin naturelle et surnaturelle de ses membres. La personne de l’<strong>ouvrier</strong> est un tout, et il s’en<br />

occupera comme tel...toute l’existence qui est prise en compte<br />

Mais sa vision sera toujours moins hiérarchique qu’organique. La rupture des liens entre<br />

les communautés naturelles, et la montée des puissances d’argent, ont recomposé un corps<br />

social où l’indivi<strong>du</strong> se retrouvé délié de tout ap<strong>par</strong>tenance à un groupe. Pour <strong>Maignen</strong>, la société<br />

est une communauté qui vit d’échanges entre ses différentes composantes, classes, corps<br />

intermédiaires, familles, personnes. Chaque classe est solidaire des autres corps, tels les membres<br />

d’un corps vivant. Dans cette perspective, on comprend le rôle fondamental des institutions,<br />

associations, petites œuvres, comme autant de relais indispensables à la reconstitution<br />

<strong>du</strong> tissu social.<br />

Ensuite, quant au dévouement, sa nécessité s’est très tôt imposée à son esprit. Son père,<br />

d’origine bourgeoise, avait fréquenté un <strong>monde</strong> supérieur où il pensait trouver protection et<br />

bienfaits. Mais son attente avait été régulièrement trompée: "L’aristocratie des riches ne réveille<br />

aucune idée généreuse", avait-il répété, désabusé, à ses fils. Pourtant, <strong>par</strong> noblesse de<br />

caractère, il restera toujours persuadé que la générosité et le dévouement sont l’apanage des<br />

classes supérieures. Noblesse oblige...<strong>Maurice</strong> héritera de cette conviction paternelle. Ce dévouement<br />

d’une classe favorisée envers celle qui ne l’est pas ne relève en rien de la condescendance,<br />

mais elle est de l’ordre <strong>du</strong> devoir moral. C’est dans la nature des choses que ceux à<br />

qui Dieu a donné le "pouvoir de commander soient réciproquement et indispensablement<br />

obligés" de s’employer au bien de ceux dont ils ont la charge....<br />

Aussi <strong>Maignen</strong> appliquera-t-il cette loi, "commune aux rois et aux magistrats", à tous<br />

les échelons de l’échelle sociale: aux pères de famille, aux maîtres et chefs d’atelier, aux riches,<br />

et surtout à la nouvelle classe des in<strong>du</strong>striels et des patrons chrétiens. 50 Ainsi, l’Œuvre<br />

<strong>du</strong> patronage, ne serait guère possible sans le dévouement quasi-absolu de ses cadres, comme<br />

l’expliquent le Manuel <strong>du</strong> patronage ou le Manuel <strong>du</strong> visiteur de la Société de Saint-Vincentde-Paul.<br />

S’il raisonne en termes de hiérarchies, ce sera dans ce domaine: la race, la noblesse,<br />

l’instruction, l’argent, vous obligent et vous imposent des devoirs.<br />

50 Œuvre des Cercles catholiques d'Ouvriers, Rapport de la réunion <strong>du</strong> 11.12.1876. p.7-8.<br />

58

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!