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Maurice Maignen - Apôtre du monde ouvrier - par Richard Corbon s.v.

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dial qui me mette l’esprit en paix et nous laisse à l’égard l’un de l’autre en union vraie et en<br />

bonne disposition de cœur. Toutefois comme je puis me tromper et que je ne suis pas seul<br />

dans cette cause qui nous est commune, je vous abandonne absolument la décision. Si la vie<br />

de bienveillance et de tolérance réciproque que nous menions vous semble préférable, je suis<br />

encore disposé à renoncer à ce projet et à me conformer de tout point à vos vœux". En septembre,<br />

le consentement est donné. Dans une lettre <strong>du</strong> 17, Clément Myionnet annonce à Mgr<br />

Angebault que, la veille, M. LePrevost a reçu de sa femme "toute liberté de se consacrer à<br />

Dieu".<br />

Quant à <strong>Maurice</strong> <strong>Maignen</strong>, passée l’inoubliable journée <strong>du</strong> 3 mars, il <strong>par</strong>tage sa vie entre<br />

ses devoirs d’état et sa famille, tout en se livrant, aux côtés de M. LePrevost à quelques<br />

pratiques de piété, -la messe à la chapelle des Lazaristes, la lecture spirituelle rue <strong>du</strong> Regard,<br />

et la récitation <strong>du</strong> petit office de la Sainte Vierge.<br />

Mais dans son apostolat, il se trouve soudain confronté à une difficulté imprévue, dont il<br />

va triompher grâce à ses dons d’artiste et à son sens <strong>du</strong> contact. Ce n’était pas le combat <strong>du</strong><br />

premier jour, toujours lancinant, de savoir où et quand trouver le courage de se sé<strong>par</strong>er de sa<br />

mère, pour rejoindre un jour ses deux confrères, comme il en a toujours eu la ferme intention.<br />

39 Il s’agissait, pour le jeune artiste bourgeois et délicat qu’il était, de se faire violence<br />

pour affronter la "grossièreté" des jeunes apprentis. Laissons-le raconter comment il sut manoeuvrer:<br />

"M. LePrevost avait procuré à M. Myionnet quelques coopérateurs pour le seconder<br />

dans l’œuvre <strong>du</strong> Patronage, alors informe et dans son enfance. Je lui donnai mon faible concours<br />

comme professeur de dessin. C’est <strong>par</strong> ce moyen qu’entrant en rapport <strong>par</strong>ticulier avec<br />

les enfants je commençai à comprendre l’œuvre <strong>du</strong> Patronage et à l’aimer. Elle m’avait inspiré<br />

tout d’abord une profonde répugnance; j’avais été effrayé <strong>par</strong> l’aspect de ces enfants de<br />

faubourgs bruyants et indisciplinés. Leurs cris, leur tapage, leurs jeux grossiers et leur extérieur<br />

misérable m’inspiraient une vive répulsion dont je fis <strong>par</strong>t à M. LePrevost et je me promis<br />

bien sincèrement de ne jamais m’occuper de ma vie d’une <strong>par</strong>eille œuvre. Mais, pressé de<br />

venir en aide à M. Myionnet, qui seul, ne pouvait suffire pour la con<strong>du</strong>ite d’une entreprise<br />

aussi difficile, je commençais à donner des leçons de dessin à ces enfants qui, pris en masse,<br />

m’avaient <strong>par</strong>u si désagréables. Quand je les vis en <strong>par</strong>ticulier, mes préjugés tombèrent. Leur<br />

situation malheureuse me toucha. Alors surtout l’apprenti était la victime de la cupidité des<br />

maîtres et de la brutalité des <strong>ouvrier</strong>s. Leur courage et leur gaieté au milieu de leurs peines<br />

m’attachèrent bientôt à eux. Leurs manières affectueuses achevèrent de me gagner et je me<br />

jetai corps et âme dans cette œuvre qui me <strong>par</strong>ut plus intéressante à mesure que j’en connus<br />

l’importance et les difficultés".<br />

Quoi? Le jeune <strong>Maignen</strong>, qui, à quinze ans, avait tant sillonné les rues de la capitale<br />

pour manger à sa faim, n’avait donc pas frayé avec la jeunesse des quartiers pauvres? Quelques<br />

heures de dessin auront suffi pour vaincre sa sensibilité...d’artiste. Chacun des protagonistes,<br />

le professeur et les élèves, avait gagné le cœur de l’autre...Un jour, il mettra son talent<br />

de dessinateur au service de ses chers enfants: contemporaine <strong>du</strong> Gavroche de Hugo, mais<br />

précédant le célèbre petit Poulbot <strong>du</strong> portraitiste montmartrois <strong>du</strong> même nom, sa silhouette de<br />

Moucheron l’apprenti, qui ap<strong>par</strong>aîtra sur ses revues de patronage des années 1860, fera bonne<br />

figure <strong>par</strong>mi le petit peuple, fier et pauvre, des gamins de Paris.<br />

39 Car, dès le 3 mars, et jusqu’au jour où il les rejoindra, M. Myionnet a pu, légitimement, douter de sa vocation: "M. <strong>Maignen</strong><br />

à ce moment ne pensait nullement à venir avec nous". <strong>Maignen</strong> lui répondra: "Au contraire, j’en avais un très vif désir".<br />

L’obstacle était la "faiblesse de son cœur". On verra plus loin comment M. <strong>Maignen</strong> provoquera finalement la rupture<br />

avec sa famille.<br />

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