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Maurice Maignen - Apôtre du monde ouvrier - par Richard Corbon s.v.

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eaucoup de mourants et un grand nombre de jeunes hommes ap<strong>par</strong>tenant à la garde mobile<br />

ont pu recevoir <strong>par</strong> leur intermédiaire les secours de la religion".<br />

En effet, aidés de quelques religieuses, les Frères avaient commencé <strong>par</strong> organiser une<br />

"ambulance" de trente lits rue <strong>du</strong> Regard. Mais ils sont trop éloignés <strong>du</strong> théâtre des opérations.<br />

A l’hôpital Cochin, on refuse leur aide. Myionnet et <strong>Maignen</strong> s’en vont alors proposer<br />

leur aide à l’Hôtel-Dieu, où ils se mettent au service <strong>du</strong> docteur Charles Ozanam, frère de<br />

Frédéric. Vision d’horreur des guerres civiles, les plus terribles...M.<strong>Maignen</strong> photographie<br />

dans sa mémoire ce Paris qui s’entretue...il en fera la matière d’un petit récit populaire, recueillant<br />

les impressions de ces nuits passées, (Légendes de l’Atelier, Pasteurs et mercenaires.1867)<br />

et revivra la même tragique aventure sous la Commune de 1871..."Les civières continuent<br />

sans cesse leurs tristes voyages. L’Hôtel-Dieu est comble. La nuit approche, et avec<br />

elle, les tortures des blessés redoublent...la nuit n’arrête pas le combat et, de temps en temps,<br />

le malade est réveillé <strong>par</strong> le cri <strong>du</strong> soldat qui répète, au loin, dans les ténèbres, ce cri sinistre:<br />

"sentinelle, garde à vous!"<br />

Or, ce même cri, Myionnet et <strong>Maignen</strong> l’ont poussé, eux aussi, à leur corps défendant,<br />

car ils ont dû s’enrôler dans la garde nationale. Les gens <strong>du</strong> quartier ne sont pas sans remarquer<br />

les allées et venues régulières de ces hommes qui se rendent chaque jour à l’église <strong>par</strong>oissiale,<br />

toute proche. Les gardes nationaux qui s’exercent sur la place de la mairie,<br />

s’interrogent: "- ce sont des curés, ils vont à la messe, dit l’un d’eux. – Non, répond un second,<br />

ils n’ont pas de robe. – mais alors, si ce ne sont pas des curés, il faut qu’ils viennent<br />

faire l’exercice comme nous". 85<br />

Au sergent qui vient leur en faire la demande, les Frères répondent qu’ils habitent Paris.<br />

Ils ne peuvent donc faire l’exercice des deux côtés à la fois. Cinq jours à la rue <strong>du</strong> Regard et<br />

deux jours à Grenelle, les Frères peuvent, sans mentir, dire qu’ils résident sur les deux quartiers.<br />

Mais après les journées de juin, le service de la garde nationale devient plus actif et plus<br />

pénible. Le sergent de Grenelle leur demande d’apporter la preuve qu’ils ap<strong>par</strong>tiennent à la<br />

garde nationale <strong>par</strong>isienne. Poussés ainsi dans leurs retranchements, Myionnet et <strong>Maignen</strong> se<br />

font inscrire au quartier Saint-Sulpice. Les voilà soldats! "Pour moi, rapporte malicieusement<br />

Myionnet, je pouvais me tirer d’affaire, j’avais treize ans de service dans la garde nationale<br />

d’Angers; je savais faire l’exercice et crier: qui vive? quand j’étais de faction. Mais M. <strong>Maignen</strong><br />

était un vrai novice! Il n’avait jamais touché une fusil, à peine savait-il <strong>par</strong> quel bout le<br />

prendre. Je lui fis donc faire l’exercice: "Portez arme...présentez arme...arme...bras". Ainsi M.<br />

<strong>Maignen</strong> apprit-il à crier "qui vive...patrouille...caporal, venez reconnaître patrouille...etc."<br />

Myionnet reconnaît que son élève sut vite rattraper son instructeur, mais qu’il ne <strong>par</strong>vint jamais<br />

à lui donner une allure martiale! Le garde national <strong>Maignen</strong> avait beau se souvenir de<br />

son père, garde royal de Louis XVIII, il ne <strong>par</strong>venait pas à porter l’uniforme comme lui le<br />

portait, avec sa prestance naturelle. Et Myionnet de conclure: "nous montions la garde tous<br />

les jours. Nous étions scrupuleux pour bien faire notre double service de garde national et de<br />

Frère de Saint-Vincent-de-Paul". 86<br />

Dès les premières heures des troubles, le Frère Myionnet avait été frappé <strong>par</strong> le climat<br />

de fraternité et <strong>par</strong> l’absence d’hostilité envers la religion et il n’hésite pas, comme <strong>Maignen</strong>,<br />

à affirmer en toute humilité que les Frères ont su se faire aimer de leurs apprentis et <strong>ouvrier</strong>s:<br />

85 S. Grandais, Vie de Clément Myionnet, op.cit., p.411.<br />

86 Tragique marque <strong>du</strong> destin: en avril 1871, Henri Planchat, le premier prêtre de l'Institut, accomplissait fidèlement son<br />

ministère pastoral, lorsqu’il fut arrêté <strong>par</strong> cette même garde nationale, qui s’était fédérée le mois précédent et qui constituait<br />

alors le bras armé de la Commune de Paris. La Communauté allait payer à la guerre civile un tribut bien plus lourd<br />

qu'en 1848.<br />

85

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