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Du papyrus à l'hypertexte

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CHRISTIAN VANDENDORPE<br />

direct : ce qui est enregistré, ce n’est pas de l’écrit, mais des sons.<br />

Or, on ne “lit” pas une bande audio, on ne peut que l’écouter. La<br />

différence entre les deux activités est capitale. Le son est par nature<br />

transitoire. Il n’existe que dans la durée de sa production : il<br />

ne peut être figé, fixé dans un moment donné. L’oral relève donc<br />

du flux temporel. Au contraire, ce qui est soumis <strong>à</strong> l’empire de<br />

l’œil peut être arrêté et manipulé <strong>à</strong> volonté: on peut <strong>à</strong> tout moment,<br />

et sans le secours d’une technologie particulière, retourner<br />

en arrière dans le texte, isoler des segments, les figer sous le<br />

regard ou les mettre en relation avec d’autres segments, établir<br />

des hiérarchies, placer des repères, faire des annotations, flécher<br />

des parcours. La vue est le sens par excellence de l’intellection car<br />

elle permet d’analyser <strong>à</strong> volonté les données considérées. L’ouïe,<br />

au contraire, capte toute la masse sonore présente <strong>à</strong> un moment<br />

donné — même si le cerveau peut apprendre <strong>à</strong> neutraliser avec<br />

succès des bruits ambiants — et elle ne peut la saisir que si elle<br />

ne la fige pas, mais la suit dans son mouvement temporel. Pour<br />

ces raisons, le monde sonore ne fait pas, normalement, l’objet<br />

d’une lecture, car cette opération exige un contrôle des données<br />

que l’ouïe ne saurait fournir. Par ailleurs, le monde du visible ne<br />

se rapporte pas exclusivement, loin s’en faut, <strong>à</strong> celui du lisible,<br />

mais le déborde et l’excède de toutes parts, car tout ce que l’on<br />

voit n’appelle pas une lecture ni ne se prête <strong>à</strong> cette opération.<br />

Il ne faudrait cependant pas non plus rabattre la lecture<br />

sur le seul matériau langagier, car on peut très bien lire autre<br />

chose que du texte. Ainsi apprend-on <strong>à</strong> lire un graphique, un<br />

schéma, un diagramme, un plan ou une carte géographique.<br />

Dans ces divers exemples, la présence d’une opération de lecture<br />

se reconnaît au fait qu’il est chaque fois nécessaire de mettre en<br />

relation des données codées en vue de produire du sens — qu’il<br />

s’agisse des variations de hauteur d’une courbe sur un axe des X<br />

en rapport avec celui des Y ou de la distance entre des points, de<br />

la grosseur des lignes et des traits qu’on peut y apercevoir, des<br />

variations de couleur ou des symboles divers servant <strong>à</strong> désigner<br />

des réalités naturelles ou culturelles. Ces acceptions élargies du

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