Le royaume d’Icare

— À cause de la nourriture, a-t-elle expliqué. Parfois je
manque d’appétit. Manger est alors aussi agréable que de laver
le plancher avec ma langue.
Elle fait à peine quarante kilos. Durant l’après-midi, Jonathan
se sentira un colosse à côté d’elle, lui qui ferait pourtant
un bien piètre fier-à-bras. Le plus troublant est le regard
de la petite. D’une profondeur que Jonathan n’a connu que
dans les yeux de sa mère. Le thérapeute tape d’un doigt insistant
sur la liste qu’il tient. Jonathan sent John se raidir. Un
vagabond. Une âme sans attaches.
Un authentique manoir. Les domestiques s’occupent des
bagages tandis qu’un baron les accueille. La seconde journée
d’abstinence s’annonçait insoutenable quand une bouée de
sauvetage apparaît. Les Reeves descendent d’un taxi avec
Nilsson. De trop dans un costume zébré de plis, une mèche
au front. Un « chess bum ». Le grand adolescent lui sourit,
heureux de le revoir. Une sensation vive d’énergie quand
Reeves lui secoue la main. Jonathan doit lever la tête. Son
regard glisse à sa compagne, une grande fleur odorante. Le
couple salue chacun avec une politesse insistante. Si grands.
L’intelligence vive de l’homme et la démarche sensuelle de
sa dame ne suffisent pas...
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— Jonathan, que disent-ils glisse Hanna à son oreille.
L’homme en blanc insiste. Pointé vers Anne, l’index cadence
ses recommandations. Il consulte un document puis
interrompt le petit edelweiss qui avait vu l’occasion d’un «
mais ». Elle se tait en soupirant, la jambe nerveuse. « Titré
en sagesse et porteur de sarrau, l’homme ne parle plus, il
explique. » Une « grâcieuseté ». Qu’elle est patiente, la toute
délicate. Comme elle a soif d’attention.
«
»