Rapport final : « Pour un renouveau urbain : gestion <strong>de</strong>s héritages et inégalités ».B- ETAT DES LIEUX DES INEGALITES SOCIALESLes rapports du préfet et les débats du conseil général entre 1968 et 1970, au moment <strong>de</strong> lacréation <strong>de</strong>s nouveaux départements, <strong>de</strong>ssinent le portrait d’un territoire sous-équipé.Les équipements scolaires sont largement insuffisants. Sur 57.5550 enfants scolarisés dans lesécoles maternelles <strong>de</strong> Seine-Saint-Denis en 1968, 10.000 le sont dans <strong>de</strong>s classes <strong>de</strong> plus <strong>de</strong>50 élèves (jusqu’à 66 par classe) et 6.000 enfants ne peuvent pas être scolarisés, alors que cedépartement compte un très fort taux <strong>de</strong> mère exerçant une profession 18 . Selon l'Inspectiond'Académie, il faudrait 70.000 places. Le retard est surtout important dans les communes <strong>de</strong>Seine et Oise.L'enseignement secondaire et supérieur est aussi un parent pauvre, puisque aucunétablissement d'enseignement secondaire ou supérieur n'a été installé en banlieue jusqu'en1940. Les lycées ne sont apparus qu'après la guerre 19 . Le département est le plus mal loti enlycées d’Etat et CES d’Ile-<strong>de</strong>-France. Il compte 19.000 places en lycées, soit 153 pour 10.000habitants, quand les Hauts-<strong>de</strong>-Seine en comptent 38.000 (261 pour 10.000 hbts), les Yvelines26.000 le Val <strong>de</strong> Marne 23.000 (206 pour 10.000 hbts) et le Val d’Oise 16.000 (233 pour10.000 hbts) 20 . L’inspecteur d’Académie Flamand souligne le manque <strong>de</strong> formation du corpsenseignant : à la rentrée 1968, seuls 75 débutants sur 2330 avaient reçu une bonne formationprofessionnelle (dont 33 à l’école normale du Bourget).Les enseignants du département <strong>de</strong> la Seine gagnaient + qu’ailleurs : in<strong>de</strong>mnité correspondaità 23,8% <strong>de</strong> leur traitement <strong>de</strong> base. CG93 voudrait maintenir ce bonus pour être sûr <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>rdu personnel qualifié dans le département. Mais comment ?Le département connaît aussi à ses débuts une pénurie <strong>de</strong> fonctionnaires, puisque les servicestechniques fonctionnent avec seulement 55% <strong>de</strong>s effectifs prévus. Les fonctionnaires <strong>de</strong>l’ancienne Seine n’ont pas accepter d’être mutés, car ils perdaient trop d’avantages financierset ceux <strong>de</strong> l’ancienne Seine et Oise n’ont pas voulu venir travailler en Seine-Saint-Denis. 21Les services préfectoraux ne disposent, selon le préfet lui-même, que <strong>de</strong> 40% <strong>de</strong>s effectifsdont ils ont besoin : il a 130 personnes dans ses services, alors que les départements, enprovince, ont 250 agents pour quatre fois moins d’habitants que la Seine-Saint-Denis.18 Rapport présenté par Akoun, PV CG93, année 1968.19 Rapport du préfet au CG93, séance du 7 mai 1969.20 Rapport du préfet au CG93, séance du 7 mai 1969.21 Rapport d’ Hervio directeur <strong>de</strong> la DDE, au CG93, PV CG93, année 1968. Le personnel <strong>de</strong> l’ancienne Seineavait un statut particulier, plus avantageux que le statut ordinaire.28
Rapport final : « Pour un renouveau urbain : gestion <strong>de</strong>s héritages et inégalités ».Les <strong>recherches</strong> sur les années 1950-2000 ont confirmé les analyses faites lors d’étu<strong>de</strong>sprécé<strong>de</strong>ntes portant sur 1850-1950. Nous insistons ici sur le résultats concernant les inégalitéssociales et les risques environnementaux <strong>de</strong>s cinquante <strong>de</strong>rnières années.Les difficultés socio-économiques ont été i<strong>de</strong>ntifiées. Plusieurs <strong>recherches</strong> universitaires,enquêtes régulières <strong>de</strong> la DDE 22 ou pour le compte du conseil général <strong>de</strong> la Seine-Saint-Denisleur ont été consacrées 23 : emploi – industriel et surtout à partir <strong>de</strong>s années 1970 –, populationactive, habitat, équipements.Les résultats du <strong>de</strong>rnier recensement – 1999 – éclairent la fin <strong>de</strong> la décennie 1990 24 . Deséléments qui caractérisaient le territoire <strong>de</strong> l’actuelle Seine-Saint-Denis <strong>de</strong>puis cent ans sonttoujours présents : la précarité <strong>de</strong> l’habitat, l’importance <strong>de</strong> l’immigration, la jeunesse dudépartement et le manque <strong>de</strong> formation. Un autre élément, apparu <strong>de</strong>puis les années soixantedixet quatre-vingts, est fondamental : un taux <strong>de</strong> chômage élevé.1- LA PRECARITE DE L’HABITATUne <strong>de</strong>s questions les plus urgentes à la fin <strong>de</strong>s années soixante est le logement. La Seine-Saint-Denis (contrairement aux départements <strong>de</strong>s Hauts <strong>de</strong> Seine et du Val d’Oise) n’a pasd’office départemental d’HLM. Pourtant, selon les fichiers <strong>de</strong>s maires, 45.000 personnes sontmal logées et 8.000 jeunes ménages se constituent chaque année, aspirant à se loger hors <strong>de</strong>sdomiciles paternels et <strong>de</strong>s hôtels garnis. 52.000 logements sont surpeuplés. Un tiers dupatrimoine immobilier a plus <strong>de</strong> cinquante ans« et il convient d’envisager son remplacement,ce qui ne surprend d’ailleurs personne, connaissant l’état <strong>de</strong>s centres villes qui atten<strong>de</strong>nt<strong>de</strong>puis <strong>de</strong> longues années les rénovations qui doivent être prises en compte comme c’est le casà Saint-Ouen et à Saint-Denis pour ne citer que ces <strong>de</strong>ux villes. » 25 .Il faudrait construire 20.000 logements par an, dont 15.000 à caractère social, pour rattraper leretard. Pourtant l’enveloppe départementale, la meilleure <strong>de</strong> la région parisienne selon lepréfet, <strong>de</strong> 1969 ne permet <strong>de</strong> construire que 5.000 logements. Pourtant, les communespossè<strong>de</strong>nt les terrains nécessaires pour construire 16.000 logements <strong>de</strong> plus. Il leur manque le22 DDE, GEP, Premiers éléments sur l’évolution <strong>de</strong> l’emploi en Seine Saint Denis entre les recensements <strong>de</strong>1975 et 1982, juin 1984, 23 p.23 CIRSES , Étu<strong>de</strong> sur l’évolution <strong>de</strong>s emplois et <strong>de</strong>s qualifications sur le territoire <strong>de</strong> la Plaine Saint Denis ,Étu<strong>de</strong> réalisée par le CIRSES-Paris VIII pour le Conseil général <strong>de</strong> Seine Saint Denis, juin 1992, 80 p. +annexes.24 Premiers éléments socio-démographiques du département <strong>de</strong> la Seine Saint Denis et <strong>de</strong> ses villes. Lapopulation. Exploitation du recensement <strong>de</strong> 1999, CG93, 2002 ; Recensement <strong>de</strong> la population 1999: petitecartographie <strong>de</strong> la Seine Saint Denis: population, niveau <strong>de</strong> formation, scolarisation et logement, CG93,Direction départementale <strong>de</strong>s affaires sanitaires et sociales, Bobigny, 2001.25 Rapport du préfet sur la situation du département, séance du 9 mai 1969. PVCG93.29