EUD - Institut d'histoire contemporaine - Centre Georges Chevrier ...
EUD - Institut d'histoire contemporaine - Centre Georges Chevrier ...
EUD - Institut d'histoire contemporaine - Centre Georges Chevrier ...
You also want an ePaper? Increase the reach of your titles
YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.
Antonio Elorza 259<br />
«�canailles�»�; il n’imagine pas que les jeunes socialistes puissent avoir des réticences à<br />
l’égard de Staline. C’est la tradition bolchevique qui inspire ses propositions concernant<br />
l’action éventuelle du PCE après le succès électoral, avec des projets de loi présentés<br />
«�avec la fougue révolutionnaire nécessaire pour qu’ils soient défendus devant les<br />
masses�», les socialistes étant démasqués devant les ouvriers s’ils refusaient de les<br />
appuyer. Le meilleur allié reste, selon le critère stalinien, un adversaire à absorber ou à<br />
détruire. Le choix des mots demeure illustratif et Manouilsky parle de «�ce bloc que l’on<br />
appelle front populaire en Espagne�». Dans la résolution du secrétariat, il insiste même sur<br />
l’indépendance des communistes qui doivent défendre leurs positions propres�: «�les<br />
candidats communistes [résume-t-il] devront expliquer pendant la campagne qu’ils<br />
lutteront non seulement pour le programme limité du bloc populaire [sic] mais pour tout<br />
le programme de la révolution démocratique bourgeoise�1�».<br />
La victoire du 16 février suscite d’abord un réflexe de prudence face aux premières<br />
nouvelles de conspiration militaire. Ouvrant le chemin qui sera suivi jusqu’à la fin de la<br />
Guerre civile, le Front populaire devient en tant que tel le protagoniste – défensif – des<br />
directives que le secrétariat, toujours dirigé par Manouilsky, rédige pour le PCE, lors de sa<br />
réunion du 21 février :<br />
«�Tant que le fascisme ne sera pas totalement battu, il s’efforcera d’organiser la guerre civile<br />
dans le but de saboter l’application du programme du front populaire et de discréditer ce<br />
dernier aux yeux des masses. Il organisera des complots contre la république avec l’aide de<br />
ses agents dans l’appareil de l’état, notamment dans l’armée et dans les autres organes<br />
armés�2.�»<br />
D’où la nécessité d’une énergique politique d’épuration de l’armée et aussi d’une<br />
application rapide du programme pour gagner les masses. Ces indications viennent peutêtre<br />
du sommet, car apparaît aussi la nécessité de développer «�une lutte énergique contre<br />
la secte trotskyste contre-révolutionnaire�». Les directives étaient accompagnées d’une<br />
lettre à J. Diaz – avec obligation de «�la montrer à Medina et aux autres amis�» – où les<br />
mêmes idées avaient une tonalité plus dramatique. Ou le Front populaire agissait avec<br />
rapidité et efficacité, ou les démocrates et les révolutionnaires seraient balayés. Toute<br />
action extrémiste, qu’elle soit anarchiste ou fasciste, devait être combattue. Les réserves et<br />
les critiques à l’égard de Largo Caballero disparaissaient, et on demandait à la direction du<br />
PCE «�de se mettre totalement d’accord avec lui�» dans la perspective d’une action<br />
commune au parlement et au-dehors�3.<br />
L’existence de tensions entre la conception du front et celle du bloc est alors<br />
logique. Pour Codovilla, les limites du gouvernement républicain et l’aiguisement des<br />
antagonismes politiques sont un motif de satisfaction : ils annoncent que le PCE se<br />
1.�CRCEDHC, 495-18-1073.<br />
2.�CRCEDHC, 495-18-1075 (original en français).<br />
3.�CRCEDHC, 495-10a-106.<br />
© 1996 - <strong>EUD</strong> - <strong>Institut</strong> d’histoire <strong>contemporaine</strong> - UMR CNRS 5605 - uB - 2 bd Gabriel - bur. R56 - 21000 Dijon