EUD - Institut d'histoire contemporaine - Centre Georges Chevrier ...
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Michel Ralle 57<br />
l’industrialisation ne touche que des espaces réduits et où la démocratisation de l’État est<br />
bloquée par un régime, la Restauración, plus soucieux de contrôle que de consensus<br />
populaire. En revanche c’est sur les ressemblances entre le PSOE et les grands modèles qui<br />
configurent la II e �Internationale, ou encore sur les emprunts aux textes et aux attitudes<br />
guesdistes que l’attention s’est portée d’emblée lorsque les socialistes espagnols ont<br />
essayé de donner une définition d’eux-mêmes, c’est-à-dire à une époque où le courant<br />
socialiste universel était à peine en train de se structurer. On fait ici allusion non seulement<br />
à Morato, dont la production, qui ne fut pas seulement journalistique, s’étend du début du<br />
siècle jusqu’à la guerre civile, mais encore au discours officiel du parti dès que ses<br />
premières apparitions publiques –�dans les années 1880 – lui donnent une identité�1.<br />
Cette continuité dans la représentation, sur laquelle nous reviendrons, permet d’interroger<br />
le lien que son historiographie entretient avec les images qu’il a construites de lui-même.<br />
Ceci suppose un réexamen de ce qui semblait admis dans l’histoire du mouvement<br />
socialiste en Espagne en même temps que le refus de considérer comme une évidence<br />
une vision figée du socialisme espagnol estompant des traits qui le distinguent des formes<br />
prises en Europe autour de la II e Internationale. Puisqu’ils sont perceptibles dans les<br />
aspects extérieurs de ses pratiques et de son discours, où une analyse un peu attachée aux<br />
textes fait apparaître d’autres références que les influences généralement mentionnées, ils<br />
incitent à ne pas considérer comme un obstacle définitif le caractère lacunaire de la<br />
documentation disponible sur le PSOE.<br />
Soulignons à nouveau que le thème choisi n’est pas sous les feux de l’actualité. Le<br />
relatif oubli où il est tombé ne sera pas corrigé par l’ouverture des archives de l’ex-URSS qui<br />
n’apporteront, ce n’est pas une surprise, que quelques compléments sur la période�2,<br />
c’est-à-dire la longue phase qui précède, avant 1910, l’insertion du Parti, combinée avec son<br />
accession à la représentation parlementaire, dans le combat pour la République dont il avait<br />
été jusqu’alors largement absent. Remarquons qu’entre la formation du groupe fondateur,<br />
qui se rassemble déjà en 1871-1872, et la conquête d’une position dans le débat politique<br />
national, il s’est écoulé presque quatre décennies, ce qui fait du parti ouvrier espagnol à la<br />
fois une des formations socialistes européennes les plus tôt constituées, même si la<br />
formalisation de son organisation est un peu postérieure (1886-1888), et une de celles qui<br />
tardent le plus à devenir une force significative dans son pays.<br />
Ni l’historiographie traditionnelle du mouvement ouvrier, ni les approches qui<br />
mettent en doute l’intérêt d’en faire l’histoire en Espagne n’ont réellement pris en compte<br />
cette longue et laborieuse continuité qui commence avec l’adhésion aux thèses du Conseil<br />
Général de l’AIT, dès que Lafargue les fait connaître à un petit groupe de Madrilènes entre<br />
1.�En particulier la série d’articles intitulés «�Apuntes falsos�» que Iglesias publie en 1884 dans<br />
l’organe du syndicalisme du textile catalan El Obrero.<br />
2.�Dans notre cas, les deux premiers numéros «�perdus�» de La Emancipación, journal fondateur<br />
du courant marxiste espagnol.<br />
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