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L’ETAT DE DROIT

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À titre d’exemple, le droit à la liberté d’expression énuméré à l’article 19 du Pacte international<br />

relatif aux droits civils et politiques se traduit également par des « devoirs et responsabilités<br />

particuliers » qui limitent cette expression de manière à indiquer le respect des droits et de la<br />

réputation d’autrui, la protection de la sécurité nationale et la préservation de l’ordre public. Vous<br />

n’avez pas le droit de crier « au feu ! » sans raison dans une salle de cinéma pleine de monde et de<br />

déclencher ainsi une panique qui pourrait mettre les usagers en danger.<br />

La portée des limitations admissibles n’est ni considérable ni généreuse et les États parties ne sont<br />

pas autorisés à agir de façon à dépouiller en réalité ce droit de tout sens pratique. La justification<br />

de toute restriction incombe à l’État partie qui doit démontrer qu’une certaine limite satisfait<br />

aux tests de la légalité, de la nécessité, du caractère raisonnable et du but légitime. De manière<br />

générale, les États doivent chercher la solution la moins restrictive au problème et lever cette<br />

restriction dès que cela leur est possible.<br />

CHAPITRE 1 | EXPLORER <strong>L’ETAT</strong> <strong>DE</strong> <strong>DROIT</strong><br />

Des concepts, comme le caractère raisonnable et la nécessité donnent manifestement lieu à<br />

différentes interprétations. Dans de telles situations, le défi à relever pour les représentants des<br />

gouvernements réside dans la méthode à adopter pour atteindre l’objectif qu’ils recherchent<br />

(empêcher, par exemple, tout discours de haine, toute incitation à la violence, tout désordre<br />

généralisé) sans avoir, de façon plus générale, de répercussions sur la vie publique.<br />

La philosophie du droit international et national peut nous orienter quant aux limites à fixer,<br />

mais les menaces pesant sur la sécurité semblent continuellement évoluer dans de nouvelles<br />

directions (armes de destruction massive, attentats-suicides à la bombe, cyber terrorisme, qui<br />

présentent tous des difficultés uniques), de sorte que les États se retrouvent souvent confrontés à<br />

ces défis en ayant peu de précédents sur lesquels s’appuyer.<br />

Ce sont alors les valeurs fondamentales de l’État et sa culture politique qui indiquent la voie à<br />

suivre. Le 22 juillet 2011, un extrémiste de droite norvégien du nom d’Andreas Behring Breivik a<br />

assassiné 77 personnes, dont beaucoup étaient des enfants, au nom d’un programme islamophobe<br />

et relevant de la suprématie blanche. La Norvège a été ébranlée dans ses tréfonds.<br />

Jens Stoltenberg, le Premier ministre norvégien, a aidé son pays à formuler la réponse de son<br />

pays à cette tragédie en déclarant lors d’une commémoration : « Nous ne renoncerons jamais à<br />

nos valeurs. Nous répondons par davantage de démocratie, d’ouverture d’esprit et d’humanité ».<br />

Au sein de la police, l’équipe enquêtant sur Andreas Breivik a adopté cette déclaration comme<br />

principe directeur tandis qu’elle menait l’enquête, et la Norvège est demeurée la société libérale<br />

et ouverte qu’elle était avant les attaques.<br />

Un engagement solide à l’égard de la primauté du droit et la confirmation des droits de l’homme<br />

peuvent contribuer à prémunir l’État contre les erreurs. Il faut bien comprendre que l’introduction<br />

de restrictions a souvent un prix, à savoir une réelle diminution de la liberté individuelle et<br />

sociétale dont l’effet peut, à son tour, paralyser les relations sociales, la créativité et le commerce.<br />

Trouver le juste milieu s’avère une entreprise complexe, et se tromper peut avoir des répercussions<br />

lourdes de conséquences.<br />

Le concept des droits universels de l’homme subit périodiquement des attaques (émanant<br />

en général d’élites locales sensibles aux idées autoritaires) où ils sont assimilés peu ou prou à<br />

l’impérialisme de la culture occidentale. Dans les années 1970 et 1980, le président Marcos des<br />

Philippines et le président Suharto d’Indonésie ont fait valoir l’argument selon lequel le concept<br />

des droits individuels de l’homme était antithétique à la culture asiatique et africaine. Au cours<br />

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