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Madame de Saint-Albin 38 expose deux tab<strong>le</strong>aux de Fruits et de F<strong>le</strong>urs d’une fraîcheur<br />
exquise ; jamais, peut-être, la reproduction intelligente de la nature n’a été poussée<br />
aussi loin ; on a de la peine à croire que <strong>le</strong> parfum manque à ces f<strong>le</strong>urs si naturel<strong>le</strong>s,<br />
que <strong>le</strong> goût fasse défaut à ces fruits délicieux. Madame de Saint-Albin est coloriste<br />
dans la force du terme, et c’est la qualité par excel<strong>le</strong>nce, si nous ne nous trompons,<br />
pour <strong>le</strong>s peintres de fruits et de f<strong>le</strong>urs. Ces toi<strong>le</strong>s ont été remarquées souvent et justement<br />
appréciées, et nous avons surpris, parmi <strong>le</strong>s visiteurs, de légitimes et sincères approbations<br />
pour l’une des élèves <strong>le</strong>s plus distinguées de M. Jacobert 39 .<br />
M. Émi<strong>le</strong> Perrin 40 s’est retiré de l’éco<strong>le</strong> militante de l’art depuis quelques années,<br />
et chacun a pu regretter l’absence au Salon de l’auteur du Corneil<strong>le</strong> et du Malfilâtre 41 ;<br />
mais heureusement quelques-unes de ses élèves lui font <strong>le</strong> plus grand honneur. Nous<br />
citerons d’abord une étude remarquab<strong>le</strong> de Madame Doux 42 , appelée la Trovatel<strong>le</strong> 43 ;<br />
c’est une pauvre fil<strong>le</strong>, une enfant trouvée, assise sur un pan de murail<strong>le</strong>. Le peintre a<br />
saisi avec une finesse très grande ce type napolitain dont <strong>le</strong>s lignes arrêtées, <strong>le</strong> tout<br />
chaud et sp<strong>le</strong>ndide, prêtent tant à l’imagination et à la cha<strong>le</strong>ur du pinceau. Madame<br />
Doux possède une grande puissance de coloris ; si <strong>le</strong> dessin est indispensab<strong>le</strong> en peinture,<br />
la cou<strong>le</strong>ur néanmoins est, pour ainsi dire, la première qualité d’un peintre, puisqu’el<strong>le</strong><br />
seu<strong>le</strong> fait respirer, fait palpiter, fait vivre. On ne peut donc qu’applaudir à cette<br />
entente sérieuse du coloris, que l’on retrouve encore dans un Portrait de femme, du<br />
même auteur.<br />
Madame Henriette Browne 44 , autre élève de M. E. Perrin, a exposé quatre toi<strong>le</strong>s<br />
excel<strong>le</strong>ntes ; el<strong>le</strong> s’est souvenue de ses succès de 1855, et el<strong>le</strong> ne s’y est pas montrée<br />
inférieure. Les Puritaines sont peintes avec une consciencieuse vérité ; tout dans <strong>le</strong>urs<br />
traits, dans l’ascétisme de <strong>le</strong>ur visage, dans la coupe de <strong>le</strong>urs vêtements gris, dans <strong>le</strong>ur<br />
attitude raide et sérieuse, dénote bien <strong>le</strong>s fil<strong>le</strong>s de la secte la plus intolérante du protestantisme.<br />
Trois autres tab<strong>le</strong>aux de petite dimension, <strong>le</strong> Catéchisme, la Grand’mère, la<br />
Leçon 45 , représentent des scènes intimes tracées avec beaucoup d’esprit et de cœur ;<br />
on s’intéresse faci<strong>le</strong>ment à ces sujets simp<strong>le</strong>s et naïfs, quand <strong>le</strong> peintre a <strong>le</strong> rare ta<strong>le</strong>nt<br />
de <strong>le</strong>s rendre avec une simp<strong>le</strong> naïveté.<br />
38 Hortense Céline Rousselin-Corbeau de Saint-Albin (1817-1874).<br />
39 Jacobert : erreur identique dans <strong>le</strong> Catalogue, pour Moïse Jacobber (1786-1863),<br />
peintre français.<br />
40 Émi<strong>le</strong> Perrin (1814-1885), peintre, critique d’art et décorateur. Il codirige <strong>le</strong> Théâtre<br />
lyrique de juin 1854 en octobre 1855 et est donc pendant quelques mois <strong>le</strong> patron de<br />
Verne, qui <strong>le</strong> trouve « excessivement froid et réservé » (<strong>le</strong>ttre de début 1855).<br />
41 Jacques-Char<strong>le</strong>s-Louis Clinchamps de Malfilâtre (1732-1767), poète français.<br />
42 Luci<strong>le</strong> Doux (1853-1897), née Fournier, élève d’Émi<strong>le</strong> Perrin et de Ch. Chaplin.<br />
43 « La pose est un peu affaissée peut-être, et il faut <strong>le</strong> dire, Mme Doux trouvera-tel<strong>le</strong><br />
notre critique un peu sévère » (NADAR, p. 58).<br />
44 Henriette (Sophie) (But<strong>le</strong>r) Browne (1829-1901), française, élève de Chaplin. Rappel<br />
de médail<strong>le</strong> de 3 e classe au Salon.<br />
45 Sans doute The Reading Lesson.<br />
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