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Lire le livre - Ibiblio

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Pigeory a-t-il même pris la peine de lire la contribution de Verne ? Quoi qu’il en<br />

soit, l’éditeur feint la surprise, par deux fois, dans <strong>le</strong>s numéros suivants, parus bien<br />

après la fermeture du Salon :<br />

Une indisposition de M. Ju<strong>le</strong>s Verne nous force d’ajourner à notre prochaine livraison<br />

<strong>le</strong> compte rendu des « Œuvres de sculpture exposées au Salon de 1857 » 15 .<br />

L’indisposition de M. Ju<strong>le</strong>s Verne se prolongeant, M. Ch. d’Argé 16 a bien voulu se<br />

charger du compte-rendu de la sculpture et de celui des miniatures et aquarel<strong>le</strong>s. Notre<br />

prochaine livraison contiendra ces études qui termineront ainsi notre examen du Salon de<br />

1857 17 .<br />

En clair, Verne, selon l’éditeur, s’est dérobé à sa tâche, en omettant d’écrire sur la<br />

sculpture, sur <strong>le</strong>s « miniatures et aquarel<strong>le</strong>s » et peut-être même sur l’architecture et<br />

<strong>le</strong>s monuments publics. S’il est probab<strong>le</strong> que l’éditeur se sent lésé, la position de<br />

l’auteur, el<strong>le</strong>, était bien claire dans sa conclusion. Pour Verne, son Salon de 1857 est<br />

comp<strong>le</strong>t en lui-même.<br />

La Vision vernienne<br />

Le sty<strong>le</strong> du critique apprenti est fluide, intelligent et agréab<strong>le</strong> à lire. Il consigne de<br />

temps en temps des aperçus qui permettent de révé<strong>le</strong>r son imagination, comme el<strong>le</strong><br />

devait se manifester cinq ans plus tard, dans Cinq semaines en ballon : l’influence réciproque<br />

des représentations littéraire et pictura<strong>le</strong> ; <strong>le</strong> sens que <strong>le</strong> regard trouve dans<br />

<strong>le</strong>s paysages ; l’exotisme de l’Orient ou du grand Nord ; l’importance dans l’art de<br />

l’énergie et de la simplicité d’expression. Maints liens aux Voyages extraordinaires<br />

sautent aux yeux.<br />

Bien des descriptions soulignent <strong>le</strong>s cou<strong>le</strong>urs délicates de la Bretagne nata<strong>le</strong>, avec<br />

une attention particulière pour <strong>le</strong>s peintures de l’Erdre par Char<strong>le</strong>s Leroux et pour un<br />

tab<strong>le</strong>au de Théodore Rousseau qui montre un esquif frê<strong>le</strong> menacé par l’orage sur la<br />

Loire inférieure. L’Erdre occupe en effet une place centra<strong>le</strong> dans l’imagination vernienne,<br />

car, entre 1828 et 1840, la résidence familial donne sur cette rivière, comme<br />

éga<strong>le</strong>ment la maison de campagne des cousins germains Tronson, y compris <strong>le</strong>s bienaimées<br />

Caroline et Marie. À l’occasion, l’esquif frê<strong>le</strong> des frères Paul et Ju<strong>le</strong>s, norma<strong>le</strong>ment<br />

piloté sur cette même Loire inférieure, s’aventure dans l’Erdre.<br />

Dans ses commentaires, Verne évite norma<strong>le</strong>ment deux écueils, dans <strong>le</strong>squels<br />

tombent nombre de ses pairs : l’idéologie guerrière et chauvine qui a saisi la nation ; et<br />

la flatterie des bourgeois et de la famil<strong>le</strong> impéria<strong>le</strong>. Sur <strong>le</strong>s deux comptes, l’on peut<br />

légitimement admirer la neutralité de Verne.<br />

Le jeune écrivain se contente de proposer des analyses sensib<strong>le</strong>s et sensées ; il ne<br />

croit pas devoir expliciter de théorie ou de système esthétique. Comme il <strong>le</strong> déclare<br />

lui-même dans <strong>le</strong> 2 e artic<strong>le</strong>, son « but est de raconter tout simp<strong>le</strong>ment ce qu’on y voit<br />

et ce qu’on y entend, de présenter quelques observations personnel<strong>le</strong>s, de résumer <strong>le</strong>s<br />

diverses impressions des visiteurs, en un mot, de faire moins la critique que la chroni-<br />

15 Revue des beaux-arts (abrégée par la suite RBA), 19 e livraison, 1 er oct. 1857, p. 363<br />

(information aimab<strong>le</strong>ment fournie par Volker Dehs).<br />

16 Auguste-Philibert Chalons d’Argé (1798-1869), auteur de Contes à ma sœur<br />

(1824), Voyage du capitaine Hiram Cox dans l’empire des Birmans (1825) et Sacre et<br />

couronnement des rois et des empereurs en France. . . (1852).<br />

17 RBA, 20 e livraison, 15 octobre 1857, p. 384 (information aimab<strong>le</strong>ment fournie par<br />

Volker Dehs).<br />

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