Les Sept Jours du ta..

pain tomba à quelques centimètres du monstre. Ce dernier fixa
avec dégoût la nourriture mâchée, puis grimaça vers Bruno :
— Ostie de chien sale…
Aussitôt, le médecin lança son assiette vide tel un frisbee.
Instinctivement, l’autre se cacha le visage en couinant, mais
l’assiette passa un bon cinquante centimètres à sa droite et alla
éclater en morceaux sur le mur du fond. Les yeux du monstre
s’emplirent de peur, le même genre de peur qu’il devait y avoir
dans les yeux de sa petite Jasmine… C’était si bon de voir cette
terreur dans ses yeux à lui. Oh, oui ! si bon !…
Il sortit de la pièce en refermant la porte derrière lui.
Lentement, il rangea la cuisine. À un moment, il entendit des
bruits de chaînes. Sûrement le monstre qui tentait
douloureusement de ramper, avec son genou cassé, vers la
porte. Mais les chaînes n’étaient pas assez longues, Bruno le
savait. Au bout d’une minute, le bruit de chaînes cessa et des
gémissements étouffés se firent entendre.
Tout en rangeant le beurre dans le frigo, le médecin eut un
rictus qui pouvait s’apparenter à un sourire.
Il mit son manteau et sortit. Le temps était parfait pour la
saison : ensoleillé, mais juste assez froid pour que ce soit
vivifiant. Le médecin marcha vers le lac, les feuilles mortes
chuchotant agréablement sous ses pieds, entouré par la joyeuse
cacophonie des oiseaux. Sur la rive, il s’arrêta et contempla le
lac. Mais le splendide spectacle n’occupa pas longtemps son
esprit. Il imaginait le monstre dans le chalet, affolé, se
demandant ce qui allait suivre, pleurant de plus belle devant
l’inconnu…
Bruno ferma les yeux, leva la tête vers le ciel et laissa le froid
automnal lui masser le visage.
*
En temps normal, Josée Jutras et sa sœur Sylvie devaient se
ressembler, mais en ce moment, cette dernière ne ressemblait à
rien sauf à une survivante. Il était plus de treize heures, mais
elle était encore en robe de chambre et les cernes rouges sous
ses yeux firent renoncer le sergent-détective à lui demander
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