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à cet effet. Un décret d’application [2] précisait que cette communication au patient, ou<br />
à son ayant droit en cas de décès, pouvait se faire soit par consultation sur place soit par<br />
envoi d’une reproduction. Le législateur n’avait fait d’ailleurs que reprendre ici en 1991<br />
les règles posées par la jurisprudence du Conseil d’Etat depuis 1982 [3]. Simplement, ce<br />
qui n’était applicable qu’aux établissements publics auparavant le devenait aux établissements<br />
privés, la loi visant les deux catégories d’établissements de santé. Par ailleurs,<br />
le même décret d’application dressait la liste des documents que devait contenir, au<br />
minimum le dossier médical.<br />
Ce dispositif a fonctionné pendant dix ans sans provoquer, à ma connaissance, de difficultés<br />
majeures. On notait simplement çà et là les obstacles encore dressés par quelques<br />
confrères à cette communication - d’une manière incompréhensible - et des retards de<br />
communication qui résultaient de cela ou du manque de moyens en secrétariat, ou simplement<br />
de la négligence. Toujours est-il que les associations, pour ces raisons, ou pour<br />
d’autres de principe, réclamaient le droit à l’accès direct.<br />
Situation actuelle<br />
Le nouvel article L.1111-7 du code de la santé publique dispose que l’accès aux informations<br />
du dossier médical est ouvert au patient soit directement soit par l’intermédiaire<br />
d’un médecin qu’il désigne. Il précise que cette communication d’information doit avoir<br />
lieu au plus tard dans les huit jours de la demande, au plus tôt après un délai de<br />
réflexion de quarante huit heures. Le délai de huit jours est porté à deux mois lorsque<br />
les informations datent de plus de cinq ans ou lorsque la commission départementale<br />
des hospitalisations psychiatriques est saisie, ce qui peut être le cas lorsque le détenteur<br />
du dossier d’une personne ayant été hospitalisée sans son consentement subordonne<br />
l’accès au dossier à la présence d’un médecin. Dans tous les cas le médecin détenteur du<br />
dossier peut recommander la présence d’une tierce personne. Pour les mineurs, le droit<br />
d’accès est ouvert aux titulaires de l’autorité parentale. Le mineur peut demander qu’il<br />
se fasse par l’intermédiaire d’un médecin. Il peut également s’opposer à la consultation<br />
du dossier par ces mêmes titulaires de l’autorité parentale.<br />
Le décret d’application du 29 avril 2002 [4] précise que l’accès est ouvert au patient, aux<br />
titulaires de l’autorité parentale, au tuteur, à ayant droit après le décès du patient, celuici<br />
devant motiver sa demande. Il se fait comme précédemment soit par consultation sur<br />
place, soit par envoi d’une copie.<br />
Contrairement à la situation précédente, les professionnels de santé sont visés par ce<br />
dispositif au même titre que les établissements de santé publics ou privés. Les dossiers<br />
de consultation sont concernés comme les dossiers d’hospitalisation. En ce qui concerne<br />
les pièces qui doivent figurer au dossier, quelques innovations apparaissent. La principale<br />
est que les correspondances entre médecins sont des pièces du dossier. Il est précisé<br />
que chaque pièce du dossier doit être datée et identifiée au nom du patient et au nom<br />
du professionnel qui a recueilli ou produit les informations.<br />
Commentaires<br />
Beaucoup trouveront - et je suis de ceux-là - que ce dispositif, qui n’est ici que résumé<br />
dans ses grandes lignes, pêche par un excès de détail, et qu’il se révèlera très lourd, très<br />
dispendieux en temps lorsqu’il faudra le mettre en oeuvre en pratique.<br />
Par ailleurs, l’accès direct du patient au dossier débouchera dans quelques cas sur des<br />
situations de crise, soit par mauvaise compréhension du contenu de ce dossier, soit<br />
parce qu’il contient des révélations authentiquement dramatiques. Or, tout ce que l’on<br />
peut faire est de proposer un accompagnement, on ne peut l’imposer. Il y aurait ici beau-<br />
ARIBa – 4 ème Congrès International – Nantes, Novembre 2002<br />
coup à dire. La pression des associations n’a pas toujours été dénuée d’arrière-pensée.<br />
Mais le corps médical porte aussi une part de responsabilité. S’il n’avait pas, depuis toujours,<br />
été aussi réticent pour montrer son dossier au patient nous n’en serions peut-être<br />
pas là.<br />
Enfin, qu’un mineur, sans limite d’âge, puisse s’opposer sans appel à ce que ses parents<br />
ait accès aux informations le concernant peut paraître discutable. Et ce n’est pas l’obligation<br />
qui lui est alors faite d’être accompagné par une personne majeure qui peut entièrement<br />
rassurer.<br />
Sur un plan de technique juridique, nous voyons ici les inconvénients d’une loi, par<br />
essence rigide, qui vient se substituer à une construction jurisprudentielle, certes perfectible<br />
mais beaucoup plus souple par nature et beaucoup plus adaptable aux situations<br />
singulières.<br />
La jurisprudence Perruche<br />
C’est au même phénomène que nous allons assister avec la jurisprudence dite<br />
“Perruche” - mais peut être faut-il parler de la défunte jurisprudence, encore que cela<br />
reste à vérifier. Là aussi il faut sans doute faire un retour en arrière avant d’examiner la<br />
situation actuelle et de présenter quelques brefs commentaires.<br />
Bref retour en arrière<br />
Le retour en arrière concerne l’affaire Perruche - en remarquant au passage combien il<br />
peut être inhumain de jeter en pâture au public (comme je le fais ici mais est-il encore<br />
temps de le taire ?) le nom de gens qui souffrent par ailleurs tous les calvaires. Les faits<br />
ne sont que trop connus. Une erreur de laboratoire fait croire à une femme enceinte dont<br />
le premier enfant présente une rubéole qu’elle est immunisée et que l’enfant qu’elle<br />
porte ne risque rien. L’erreur n’est découverte qu’après la naissance de l’enfant quand il<br />
se révèle qu’il est atteint de séquelles gravissimes de rubéole congénitale. Les parents<br />
réclament une indemnisation en leur nom et au nom de leur enfant. C’est l’indemnisation<br />
de l’enfant qui pose problème et qui est à l’origine d’une interminable procédure<br />
judiciaire qui débouche sur un arrêt rendu le 17 novembre 2000 par l’Assemblée Plénière<br />
de la Cour de Cassation donnant satisfaction aux parents au motif que les fautes commises<br />
par le médecin et le laboratoire ont empêché Mme P. d’exercer son choix d’interrompre<br />
sa grossesse afin d’éviter la naissance d’un enfant atteint d’un handicap, et que<br />
ce dernier peut donc demander réparation du préjudice résultant de ce handicap et<br />
causé par les fautes retenues.<br />
Une tempête médiatique, savamment orchestrée, s’éleva aussitôt. La Cour de cassation<br />
fut clouée au pilori, taxée d’eugénisme, suspectée de bafouer la dignité des personnes<br />
handicapées, accusée de vouloir imposer aux échographistes - qui pourtant n’étaient pas<br />
en cause ici - une obligation de résultat. Les échographistes organisèrent une grève, le<br />
législateur fut mis en demeure d’intervenir, les propositions de loi fleurirent, et le gouvernement,<br />
après quelques tergiversations, ajouta un article ad hoc au projet de loi en<br />
débat sur les droits des malades.<br />
La situation actuelle<br />
La situation actuelle est celle qui résulte de l’article 1er de cette loi du 4 mars 2002. Il<br />
dispose que nul ne peut se prévaloir d’un préjudice du seul fait de sa naissance, qu’un<br />
handicap de naissance ne peut faire l’objet d’une réparation que si il a été causé directement<br />
par une faute médicale, que les parents ne peuvent obtenir réparation pour un<br />
handicap non décelé pendant la grossesse qu’en cas de faute caractérisée et pour leur<br />
ARIBa – 4 ème Congrès International – Nantes, Novembre 2002