Sensee-Etude-Economique-Optique
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aval, et le rôle tiers du système de santé (sécurité sociale<br />
et complémentaires) opacifie encore davantage la lecture<br />
des intérêts en jeu pour le consommateur.<br />
A l’amont, la production de verres est dominée par Essilor<br />
qui détient une part de marché de plus de 40 % au niveau<br />
mondial et de près de 90 % en France, loin devant ses<br />
concurrents Zeiss et Hoya. La production de montures,<br />
autre élément essentiel à la constitution des lunettes est<br />
largement dominée par Luxottica, qui est près de cinq<br />
fois plus important que son plus proche concurrent.<br />
A l’aval, moins d’une dizaine de groupes concentre l’essentiel<br />
de la distribution au détail. Le marché français se<br />
caractérise par l’abondance de points de vente, bien plus<br />
nombreux que dans la plupart des pays comparables : la<br />
France compte 1 point de vente pour 5 400 habitants contre<br />
1 pour 15 000 aux Etats-Unis. Les opticiens, qui peuvent<br />
seuls les détenir et les gérer, ont depuis peu la possibilité<br />
de renouveler les lunettes, sans intervention d’un ophtalmologiste.<br />
Le système de santé français rembourse une partie (ou<br />
la totalité) des dépenses d’optique. Cette intervention<br />
relève très largement des complémentaires, la sécurité<br />
sociale proposant une compensation marginale. Elle<br />
permet de rendre solvables les consommateurs finals et<br />
tend à entretenir l’illusion chez ces derniers qu’ils n’assument<br />
pas les dépenses d’optique, alors qu’en réalité ils les<br />
supportent indirectement à travers le financement de la<br />
sécurité sociale et les cotisations auprès de leurs complémentaires<br />
et directement à travers le « reste à charge »<br />
qu’ils paient à l’opticien.<br />
Des doutes concurrentiels importants à l’amont<br />
Le secteur amont, notamment la production de verres<br />
correcteurs, se révèle être très concentré : quelques rares<br />
Le fonctionnement concurrentiel<br />
du marché français de l’optique<br />
est très imparfait, à la fois en amont<br />
du côté des fournisseurs<br />
de verre, et en aval du côté<br />
des distributeurs.<br />
producteurs réalisent l’essentiel de l’activité, loin devant<br />
leurs concurrents. Ces principaux acteurs poursuivent en<br />
outre des stratégies de consolidation verticale et de différenciation<br />
croissante de leurs produits qui ont pour effet<br />
de renforcer leurs positions.<br />
L’article scientifique inédit de David Martimort et Jérôme<br />
Pouyet 1 , dont les principales conclusions sont rendues<br />
publiques dans cette étude, montre que cette stratégie a<br />
une double conséquence : elle tend à limiter de facto la<br />
concurrence en amont, mais elle la freine aussi en aval, via<br />
un mécanisme dit de « forclusion » ; la firme dominante<br />
en amont a intérêt à favoriser des stratégies de distribution<br />
qui évincent les nouveaux entrants. Ces derniers,<br />
en fournissant des produits moins chers, risqueraient en<br />
effet de réduire le surplus qu’elle accapare.<br />
A l’aval, plusieurs constats font douter du bon<br />
fonctionnement concurrentiel du secteur<br />
Les points de vente de distribution au détail d’optique<br />
comptent parmi les fonds de commerce les plus chers en<br />
France. Avec une marge de 60 % en moyenne le secteur<br />
réalise un chiffre d’affaires supérieur d’un tiers à ce qu’il<br />
est dans les pays comparables à la France : si le chiffre<br />
1 David Martimort, Jérôme Pouyet, Downstream Foreclosure in Vertically Differentiated Markets, 2012, à paraître.<br />
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