Sensee-Etude-Economique-Optique
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de pratiques contractuelles pouvant limiter à l’accès à un<br />
input essentiel qu’elle fournit.<br />
Une firme qui produirait un bien pour fournir les deux<br />
seuls acteurs existants en aval pourrait limiter sa production<br />
au niveau de monopole et la répartir à part égale<br />
entre eux deux (50 % de sa production pour l’un, 50 %<br />
pour l’autre). Elle pourrait ainsi récupérer le profit de<br />
monopole correspondant à travers la tarification imposée<br />
aux deux acteurs aval. Dans l’hypothèse où les contrats<br />
de fourniture seraient secrets, la firme amont pourrait<br />
être tentée d’avantager l’une des firmes aval, au détriment<br />
de l’autre, afin de capter un profit plus grand par<br />
son intermédiaire : en réalité, cette solution serait vouée<br />
à l’échec. Avantager un des détaillants ne se fait qu’au<br />
détriment de l’autre et donc des profits que le monopole<br />
amont aurait pu récupérer au travers de sa relation<br />
contractuelle avec ce dernier. Au final, la firme amont<br />
devient donc son propre concurrent.<br />
Pour contrecarrer ces effets, la firme amont peut pratiquer<br />
des contrats d’exclusivité et ne fournir qu’un seul<br />
distributeur aval. Elle peut aussi, et c’est l’originalité<br />
du travail présenté, accroître la différenciation de ses<br />
produits, de manière à constituer autant de monopoles.<br />
La forclusion dans le cas de produits différenciés<br />
Dans un marché de produits ainsi différenciés, les<br />
consommateurs finals choisissent leur détaillant en<br />
fonction du meilleur rapport qualité-prix : c’est selon ce<br />
critère que se segmente le marché, les consommateurs<br />
les plus disposés à payer cher ayant accès à la meilleure<br />
qualité. Le marché se divise en une multitude de<br />
segments caractérisés par des niveaux de qualité différents.<br />
En conséquence, la concurrence sur le marché aval<br />
est une concurrence en biens différenciés verticalement<br />
par leur qualité.<br />
Dans un tel contexte, le monopole amont ne cherche<br />
plus à contracter secrètement avec chacun de ses détaillants<br />
pour augmenter leurs productions respectives.<br />
Ses comportements résultent maintenant d’un choix<br />
optimisé du degré de différenciation entre les qualités<br />
produites sur les segments hauts et bas du marché. Dans<br />
cette hypothèse, qui ressemble peu ou prou à celle du<br />
marché de l’optique, les contrats de fourniture d’inputs<br />
définissent de fait la structure de coût des détaillants qui<br />
se font concurrence en aval. La firme amont cherche ainsi<br />
à agir au travers de ces contrats comme si elle était un<br />
monopole multi-produit verticalement intégré.<br />
Pour préserver les rentes de monopole associées à une<br />
telle situation, la firme amont est incitée à différencier<br />
encore ses produits. Si elle se spécialisait en ne produisant<br />
que des biens de qualité haute, les distributeurs<br />
pourraient se tourner vers un producteur concurrent,<br />
qui pourrait alors servir l’ensemble du marché avec un<br />
produit de qualité intermédiaire.<br />
Un autre enjeu pour le monopole amont est de capter les<br />
profits générés par le système des détaillants en aval. La<br />
fixation des prix en amont (et donc des marges générées<br />
par le monopole) de chacun de ses produits, résulte d’un<br />
dosage subtil : augmenter le prix d’un produit de plus<br />
grande qualité peut conduire à augmenter la demande<br />
d’un produit de moindre qualité vendu moins cher. Pour<br />
extraire le plus grand surplus des consommateurs, il peut<br />
alors être intéressant pour la firme de rendre les biens de<br />
qualité inférieure moins attractifs, afin que la demande<br />
se reporte sur des produits de meilleure qualité et plus<br />
coûteux.<br />
Dès lors que les contrats qu’il signe avec ses détaillants<br />
sont publics, le monopole amont peut mettre en œuvre<br />
une stratégie lui permettant de se comporter comme<br />
une firme verticalement intégrée, accaparant le surplus<br />
aval. Ainsi, plutôt que de contrôler directement les prix<br />
à la consommation fixés par les détaillants, le monopole<br />
amont peut se contenter de déterminer les prix des<br />
différentes qualités qu’il leur fournit. De cette manière,<br />
les choix décentralisés à l’aval répliquent les prix qui<br />
auraient été choisis par un monopole intégré verticalement,<br />
à qualités fixées et publiquement reconnues.<br />
Lorsque les contrats sont secrets, ces profits ne sont plus<br />
accessibles. Le monopole amont est maintenant confronté<br />
à un paradoxe : il est incité à renégocier avec les détail-<br />
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