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15. LES CULLEN<br />

La lumière sourde d'une nouvelle journée de grisaille finit par me réveiller. Je restai allongée, bras sur<br />

les yeux, patraque, hébétée. Quelque chose, un rêve qui essayait de resurgir, se débattait aux confins<br />

de ma conscience. Je gémis et roulai sur le flanc, priant pour que le sommeil revînt. Puis le souvenir<br />

du jour précédent s'imposa à moi.<br />

— Oh !<br />

Je m'assis avec une telle brusquerie que la tête me tourna.<br />

— Tes cheveux ressemblent à un nid de corneilles... mais ça me plaît bien.<br />

Sa voix sereine émanait du rocking-chair.<br />

— Edward ! Tu es resté<br />

Enthousiaste, je courus sans réfléchir me jeter sur ses genoux. À l'instant où mon cerveau rattrapait<br />

mon corps, je me figeai, ahurie par ma fougue incontrôlée. Je le regardai timidement, craignant d'avoir<br />

en<strong>fr</strong>eint les limites. Par bonheur, il s'esclaffa,<br />

— Évidemment !<br />

Quoiqu’un peu surpris, il paraissait heureux de mon ardeur. Ses mains me caressaient le dos. Je posai<br />

délicatement ma tête sur son épaule, humant l'odeur de sa peau.<br />

— J'étais sûre qu'il s'agissait d'un rêve.<br />

— Tu n'as pas assez d'imagination pour ça, me taquina-t-il.<br />

— Bon sang ! Charlie ! Me rappelai-je soudain. Avec la même spontanéité, je me relevai d'un bond et<br />

fonçai sur la porte.<br />

— Il est parti il y a une heure, m'annonça Edward. Après avoir rebranché les fils de ta batterie, suis-je<br />

obligé de préciser. J'avoue être déçu. Cela seul suffirait donc à t'empêcher de filer ?<br />

Je méditai cette question sans bouger. Je mourais d'envie de retourner <strong>vers</strong> lui, mais j'avais peur<br />

d'avoir mauvaise haleine.<br />

— D'habitude, tu es plus vive que ça, le matin, remarqua-t-il.<br />

Il me tendit les bras en une invitation presque irrésistible.<br />

— J'ai besoin d'une nouvelle minute d'humanité, avouai-je.<br />

— J'attendrai donc.<br />

Je sautillai jusqu'à la salle de bains, me reconnaissant à peine. J'étais une étrangère, à l'intérieur comme<br />

à l'extérieur. Le visage dans le miroir était celui d'une autre – yeux trop brillants, taches rouges<br />

fiévreuses sur les joues. Après m'être brossé les dents, je m'acharnai à démêler ma tignasse. Je<br />

m'aspergeai d'eau <strong>fr</strong>oide et m'appliquai à respirer normalement, sans résultat notoire. C'est en courant à<br />

moitié que je regagnai ma chambre. Sa présence me fit l'effet d'un miracle. Ses bras tendus n'avaient<br />

pas bougé, et mon cœur se mit à battre follement.

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