Loup d'aveugle

ŕ Si je vous dis que vous l’avez envoyé m’assassiner il y a
moins de vingt-quatre heures, ça vous rafraîchit la mémoire ?
ŕ Non !
Elle pleurait, son nez coulait et elle avait l’air au bord de
l’évanouissement. Au top, le redoutable assassin !
J’ai fait exprès de piétiner le cadavre du mage. Il s’est
affaissé en émettant un son à peine audible. Des particules
noires se sont envolées en tourbillonnant autour de nous.
ŕ Et maintenant ?
ŕ Je vous jure que je ne comprends rien ! a-t-elle hurlé. (Le
nuage de cendres de son ancien collègue a manqué de
l’étouffer.) Je vous en supplie. Je vous donnerai… ce que vous
voudrez. Demain, je dois recevoir un gros paquet, et…
ŕ Et vous deviez tuer qui ? ai-je lancé, en me demandant qui
était le prochain sur la liste.
Elle avait l’air complètement perdue.
ŕ Personne. Un de mes clients Ŕ un des hommes que je fais
chanter Ŕ a jusqu’à demain pour me régler. S’il me paie, je peux
vous donner…
ŕ Assassin et maître chanteur ! Vous n’aimez pas rester
inactive, à ce que je vois ? (J’ai extrait une autre fiole de ma
ceinture et l’ai brandie sous son nez.) Dites-moi où se trouve
Jason, si vous ne voulez pas mourir comme votre ami. Ses yeux
se sont fixés avec horreur sur le tube. Il ne contenait pas le petit
cocktail favori de papa Ŕ j’étais à court Ŕ mais elle n’en savait
rien.
ŕ Je ne sais pas de quoi vous parlez, a-t-elle chuchoté en
humectant ses lèvres tremblantes, toujours hypnotisée par la
fiole. Je vous jure que je ne connais personne qui s’appelle
Jason.
Quelque chose, dans son expression, m’a fait hésiter. La
peur, je savais ce que c’était. Je la reconnaissais quand je la
voyais. Et les gens qui ont peur font rarement de bons
menteurs.
ŕ Il y a un téléphone dans la poche droite de ma veste, ai-je
dit brusquement.
Ses yeux sont passés de l’élixir à ma personne.
ŕ Quoi ?
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