02.07.2013 Views

Loup d'aveugle

Loup d'aveugle

Loup d'aveugle

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

Je me plongeai dans les préparatifs. J’y consacrai une bonne<br />

partie de mes nuits et passai mes journées au travail tel un<br />

zombie.<br />

Le jeudi, en fin d’après-midi, je partis ressusciter le mort qui<br />

m’attendait. Je ne connaissais que trop bien le chemin de la<br />

morgue. J’avais un laissez-passer pour le parking et le gardien<br />

devant la porte me reconnut aussitôt. Il pointa tout de même<br />

mon nom sur la liste et ouvrit ma grosse valise pour en vérifier<br />

le contenu. Tout était en règle, même mes certificats de l’État du<br />

Texas. J’avais revêtu ma tenue de travail : un joli tailleur noir,<br />

parfait pour un enterrement, avec des chaussures à talons de<br />

hauteur raisonnable. Un maquillage discret. Un parfum léger.<br />

C’était une tenue parfaitement adéquate car il m’arrivait<br />

parfois de tomber sur des personnes qui croyaient encore que<br />

les sorcières avaient le visage vert, un ricanement diabolique et<br />

de gros chaudrons.<br />

Le gardien agrafa un badge temporaire à ma veste et<br />

m’escorta jusqu’aux entrailles Ŕ si je peux m’exprimer ainsi Ŕ de<br />

la morgue, qui me faisait toujours penser à une immense<br />

cuisine collective, avec toutes ces surfaces en chrome et ces<br />

instruments tranchants soigneusement disposés sur leurs<br />

supports. Une fois arrivé là-bas, il consulta l’assistant du<br />

médecin légiste, puis rebroussa chemin et m’accompagna<br />

jusqu’à une salle normalement réservée aux familles des<br />

défunts. Personne n’avait pris la peine de l’apprêter pour<br />

l’occasion, et l’atmosphère aseptisée me donna la chair de poule.<br />

L’inspecteur Prieto me mettait mal à l’aise lui aussi. Il avait à<br />

peu près l’âge de mon père, avec un air sévère et un regard<br />

froid. Il ne m’aimait pas et n’aimait pas ce qu’il était en train de<br />

faire. Il me remit la paperasse, je la lus et la signai, puis il vérifia<br />

de nouveau mon identité avant de quitter la pièce pour se<br />

rendre dans la salle d’observation.<br />

Je retirai le drap du visage du cadavre et là, pâle et immobile<br />

en face de moi, se trouvait Andrew Toland.<br />

Il avait plutôt bonne mine pour quelqu’un qui était né en<br />

1843. Surtout qu’il était mort depuis 1875. En tout état de cause,<br />

j’aurais dû contempler un squelette et non un corps<br />

parfaitement conservé. Il faut dire que, la dernière fois qu’on<br />

77

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!