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Laërce (poète et doxographe grec)<br />
il a été éduqué par le savant Anaxagore qu’il abandonne vite car il ne conçoit pas que<br />
la philosophie ne s’occupe que de la nature. Il voyage peu, sauf obligations militaires<br />
(le service accompli à Amphipolis, la bataille de Protidée). Il se suffit à lui-même, vit<br />
au grand jour, dans les promenades et les gymnases, là où il peut rencontrer la<br />
jeunesse. Il consacre sa vie à la tâche que les dieux lui auraient réservée et qui lui a<br />
été indiquée par la Pythie : ne rechercher ni les honneurs, ni la richesse, ni la<br />
vanité, mais procéder à l’examen de tout ce qu’il rencontre. Se consacrer à<br />
l’examen de soi, la manière dont on vit.<br />
Socrate se promène et parle. A première vue, il est comme un sophiste, puisqu’il<br />
parle de tout et de n’importe quoi. Mais il n’ouvre pas d’école. Il n’enseigne pas. Ce<br />
qu’il dit, c’est au gré des conversations qu’il énonce, sans demander qu’on le paie,<br />
sans même exiger qu’on l’écoute. La jeunesse s’intéresse beaucoup à ses discours.<br />
Pourquoi parle-t-il alors qu’il n’a aucun intérêt personnel à le faire ?<br />
Socrate répond à cette question dans son plaidoyer que Platon a consigné dans<br />
l’Apologie. L’oracle de Delphes lui a confié une mission. Chercher, de tous côtés,<br />
l’homme sage, et s’il n’en est pas, dénoncer la fausse sagesse. Socrate s’est soumis à<br />
ce devoir. Il questionne chacun, néglige ses affaires, ne s’occupe pas de politique. Il a<br />
pour tâche d’accoucher les âmes de ses concitoyens. Lui ne professe aucun savoir.<br />
• Le procès de Socrate<br />
Guidé par un démon, Socrate se conduit comme une « torpille ». Il réveille les<br />
consciences endormies dans le sommeil des idées reçues. Cette attitude lui vaut d’être<br />
détesté. Considérons la profession de ceux qui l’ont fait mettre en accusation. Il y a<br />
Anytos qui représente les politiques, Mélétos les poètes et les devins, Lycon les<br />
orateurs et les professeurs de rhétorique. Le procès est une réaction de la culture<br />
acquise contre une pensée qui refuse tout acquis.<br />
Le libellé de l’acte d’accusation (« Socrate est coupable de corrompre la jeunesse ; de<br />
ne pas croire aux dieux auxquels croit l’Etat, mais à des divinités nouvelles, qui en<br />
sont différentes »), les imputations qu’on lui fait (se livrer à des recherche<br />
physiciennes qui démentent les idées religieuses, détourner les jeunes gens de leurs<br />
devoirs familiaux et civiques), montrent que l’affaire est une cabale. Elle unit<br />
provisoirement des individus qui ne tiennent pas les mêmes discours et ont des<br />
intérêts divergents. Il faut se débarrasser d’un gêneur dont l’audience ne cesse de<br />
croître.<br />
• Pourquoi une telle haine ?<br />
La jeunesse et le peuple savent que Socrate est une torpille. Il faut le tuer ou l’exiler.<br />
Socrate est un esprit fort qui instaure une méthode redoutable. La conclusion de ses<br />
dialogues est en général négative. En apparence, les deux parties en présence sortent<br />
perdantes. L’homme sûr de soi qui, sollicité par Socrate, vient à la conversation avec<br />
ses réponses, sort brisé par l’entretien, irrité, décidé soit à réfléchir plus avant, soit à<br />
détester l’ironiste qui a détruit ses croyances. Socrate n’a rien gagné non plus. A<br />
l’opinion, il n’a pas opposé une autre opinion, comme le font les sophistes. Il a<br />
prouvé l’inanité de toute conduite fondée <strong>sur</strong> l’opinion et la réduit à ce qu’elle ne<br />
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