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La séparation

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Fin juin 1941, presque cinq ans après avoir participé aux jeux<br />

Olympiques avec Joe, j’étais en convalescence dans une maison<br />

de santé de la vallée d’Evesham. Ma mémoire s’affûtait peu à<br />

peu, ce que je considérais comme une preuve de guérison :<br />

bientôt, je pourrais rejoindre mon escadrille. Je marchais enfin<br />

sans béquilles, même s’il me fallait toujours une canne. Chaque<br />

jour, je faisais un tour dans les jardins, et chaque jour, j’allais un<br />

peu plus loin que la veille. <strong>La</strong> solitude me permettait de<br />

réfléchir, de me remémorer ma vie avant l’accident. Cet exercice<br />

mental avait d’abord représenté une quête désespérée de mon<br />

moi passé, mais au fil des jours, j’en étais venu à éprouver un<br />

réel intérêt pour les péripéties de mon existence.<br />

Je me rappelais par exemple que le matin de mon dernier<br />

raid, je m’étais réveillé tôt. <strong>La</strong> nuit précédente, mon escadrille<br />

n’avait participé à aucune opération, ayant été mise au repos en<br />

milieu d’après-midi.<br />

Plongé dans l’ivresse que tous les hommes éprouvaient en<br />

pareilles circonstances, j’étais allé à Lincoln avec Lofty Skinner<br />

et Sam Levy, voir en fin d’après-midi <strong>La</strong> Piste de Santa Fé, un<br />

film avec Errol Flynn et Olivia de Havilland. Nous avions<br />

ensuite dîné de poisson et de frites, nous nous étions promenés<br />

un moment dans les rues au calme vespéral de Lincoln, puis<br />

nous avions décidé de regagner nos pénates à temps pour voir<br />

décoller vers leur cible les Whitley de l’escadrille 166 Ŕ avec<br />

laquelle nous partagions la base de Tealby Moor. À dix heures et<br />

demie du soir, le silence retombé, je m’étais mis au lit. Mon<br />

sommeil avait été tellement profond que même le retour aux<br />

aurores des Whitley ne m’avait pas réveillé.<br />

Le lendemain 10 mai, après le petit déjeuner, j’avais effectué<br />

un essai aérien du A-Able, bouclant trois tours à basse altitude<br />

de l’aérodrome. Ensuite, peu avant midi, Kris Galasckja m’avait<br />

appris qu’il devait calibrer les canons de la tourelle arrière. Je<br />

l’avais emmené en Wellington jusqu’au barrage d’artillerie de la<br />

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