Les liaisons fructueuses - RUIG-GIAN
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que j’étais délégué de la Suisse au Conseil de cette<br />
organisation, avant d’en devenir le Président. Jean-<br />
Marie Dufour a été la personne idéale pour créer le<br />
réseau et mettre en <strong>liaisons</strong> harmonieuses des personnalités<br />
très différentes. Avec doigté et sensibilité,<br />
il a été le gardien de la mission du <strong>RUIG</strong>, comme<br />
il avait été le gardien des règles du CERN. Il préconisait<br />
une approche globale des problèmes, comprenant<br />
non seulement les aspects juridiques, mais<br />
encore les aspects scientifiques et politiques.<br />
Le <strong>RUIG</strong> a aussi bien fonctionné grâce à une<br />
équipe capable et aux règles de sélection strictes<br />
mises en place. <strong>Les</strong> projets étaient présentés par<br />
les chercheurs des institutions académiques et des<br />
organisations internationales et étaient évalués par<br />
un Comité scientifique compétent, suivant une<br />
procédure inspirée du fonctionnement reconnu du<br />
Conseil de la recherche du Fonds National Suisse.<br />
La qualité académique des projets était certes un<br />
critère essentiel, mais ils devaient aussi correspondre<br />
à ce que Léonard de Vinci appelait l’urgence<br />
de faire : «Savoir n’est pas suffisant ; nous devons<br />
appliquer. Vouloir n’est pas suffisant ; nous devons<br />
faire».<br />
Parmi les difficultés rencontrées par le <strong>RUIG</strong>, il<br />
est clair que son financement a été problématique.<br />
Non pas par l’Etat de Genève, qui a généreusement<br />
mis à disposition un important budget et<br />
des locaux à la Villa Rigot, mais par la Confédération.<br />
En effet, le choix par la Confédération du<br />
mode de financement du <strong>RUIG</strong> fut une source de<br />
tension. Cette dernière, représentée au Conseil de<br />
Fondation par le Secrétaire d’Etat Charles Kleiber,<br />
a utilisé un financement autorisé par l’article 16 de<br />
la Loi fédérale sur la recherche, un instrument mal<br />
adapté à cette tâche particulière. Par exemple, il a<br />
été reproché au <strong>RUIG</strong> de ne pas avoir ses propres<br />
chercheurs. Mais comment Genève pouvait-elle<br />
créer encore une autre institution de recherche en<br />
plus de l’Université, de l’IUHEI et de l’IUED ? Il a été<br />
reproché au <strong>RUIG</strong> de fonctionner comme un «mini<br />
Fonds national» : cela était certainement préférable à<br />
un système où les choix scientifiques sont imposés par<br />
un pouvoir politique. De plus, la spécificité du <strong>RUIG</strong><br />
résidait dans le partenariat entre universitaires et organisations<br />
internationales. Le Secrétaire d’Etat a souhaité<br />
transformer le <strong>RUIG</strong> pour satisfaire les voix qui<br />
à Berne voyaient d’un mauvais œil ce soutien financier<br />
à un projet presque exclusivement genevois.<br />
De participant actif à la mise en œuvre du <strong>RUIG</strong>, j’ai<br />
perdu contact avec le réseau dès l’été 2003, lorsque<br />
j’ai terminé mon mandat de Recteur de l’Université.<br />
Mais le <strong>RUIG</strong> s’est brutalement rappelé à mon souvenir,<br />
le samedi 7 juillet 2007, quand j’ai reçu un appel<br />
de Randall Harbour, son fidèle Secrétaire exécutif, qui<br />
m’apprenait la grave maladie de Jean-Marie Dufour.<br />
Ce dernier souhaitait me parler de la fin annoncée du<br />
<strong>RUIG</strong> et d’un ouvrage qu’il souhaitait voir publier<br />
sur son histoire. Je me trouvais ce jour-là dans mon<br />
chalet d’altitude. J’ai immédiatement appelé Jean-<br />
Marie Dufour au centre de soins où il avait été transporté<br />
et nous avons longuement parlé de son pronostic<br />
défavorable et de son souhait que je sois associé à<br />
l’ouvrage sur le <strong>RUIG</strong>. «A quel moment se sentait-il<br />
le plus apte à en discuter», lui ai-je demandé ? «N’importe<br />
quel jour en milieu de la semaine», m’avait-il<br />
répondu. C’est pourquoi je me suis rendu le lundi<br />
au centre de soins, et j’ai demandé à le voir : on m’a<br />
appris son décès survenu la veille.<br />
Le <strong>RUIG</strong> a donc lui aussi cessé de vivre, remplacé<br />
par une autre machine qu’il faudra bien faire tourner.<br />
Je lui souhaite bonne chance, tout en constatant que<br />
bien plus que la forme des institutions, c’est la qualité<br />
des hommes et des femmes qui s’y engagent qui<br />
compte le plus.<br />
30 mai 2008<br />
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