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des risques et, surtout, à étayer et développer les motivations de ses décisions. Ence sens le juge remplit un rôle pédagogique à l’égard de l’administration 32 , toutcomme à l’égard des requérants qui contestent son action puisque ceux-ci sonttout autant enjoints à expliciter le fondement du recours au principe de précaution,faute de voir ce moyen rejeté. Autant d’éléments qui concourent à affermir lesusages du principe. L’action du juge administratif contribue aussi, deuxièmement,à consolider le recours à l’expertise, la scène juridictionnelle devenant un lieud’exposition et de confrontation des opinions et savoirs. Ceci en fait également, ettroisièmement, un endroit où peuvent se trancher certains débats, comme lesaffaires d’installation d’antennes-relais de téléphonie mobile en fournissentl’exemple, le Conseil d’État ayant considéré qu’il s’agissait de risques non avérés.On touche ici à la question des effets plus «latents» de cette juridicisation.La poursuite des contestations en matière de téléphonie mobile pourrait signifierque cette clôture n’est que provisoire mais elle pose néanmoins la question descritères mis en œuvre par le juge pour trancher dans des contextes d’incertitudescientifique et technique. La lecture des conclusions des commissaires dugouvernement tend à indiquer, mais il faudrait affiner ce point, que l’appréciationde la validité et du sérieux des données scientifiques mobilisées conduit àprivilégier les paradigmes dominants. Ces critères d’appréciation semblent en effetreléguer à un rang secondaire les opinions dissidentes, pourtant théoriquementimportantes dans la mise en action du principe de précaution. Le refus de prendreen compte ce principe lorsque les requérants ne fournissent pas suffisamment deprécisions a la vertu pédagogique de pousser à la production et à la mise envisibilité des opinions minoritaires, mais cela suppose aussi des requérantspossédant les moyens, tant intellectuels que sociaux et financiers, de produireet/ou mobiliser des études et de les rendre audibles. De la même manière,l’exigence de proportionnalité des mesures aux risques que la jurisprudence acontribué à accroître conduit aussi à mettre en balance des intérêts dont le poidssocio-économique et politique n’est pas égal : confier au juge - mais aussi à desagences et à des comités d’experts, en vertu de la démarche casuistique adoptéepour penser la mise en œuvre du principe - le soin de trancher entre ces intérêtsrevient à placer les politiques du risque hors des débats politiques.En d’autres termes et pour conclure sous forme de question : dans quelle mesurela saisie juridique du principe contribue-t-elle à un cadrage silencieux de cespolitiques ? «Cadrage» car la jurisprudence consolide la version médiane duprincipe, notamment via le contrôle de proportionnalité, et qu’elle participe aussi,par l’interprétation qu’elle en donne, à «l’extension de la santé publique» commemode de légitimation de l’action publique 33 (Fassin D., 1996, p. 256 ; Nollet J.,2005) et, plus largement, à l’extension de l’appréhension des activités socio-32Ainsi que l’explique un commissaire du gouvernement au Conseil d’État : le principe de précaution doitpermettre «de changer les comportements de l’administration face à l’analyse des risques en renforçantl’expertise, la transparence ou l’anticipation» : Mignon E., Conclusions sous CE, 22 mai 2002, Sté SFR,n° 236223.33Conduisant à mettre l’accent sur l’usager-consommateur et sur les questions de responsabilitéindividuelle, ce qui se manifeste aussi dans le déploiement des analyses juridiques sur la notion de«risque acceptable» : (Noiville C., 2003; Conseil d’État, 2005)164

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